Ne nous emballons pas. Dans le match - et si match il y a - cinéma américain vs cinémas nationaux, Hollywood est encore loin d'être K-O. Pourtant, le succès de films venus du Mexique, d'Allemagne, de Roumanie ou de Corée du Sud envoie un signal encourageant. Non, les cinémas nationaux ne sont pas encore tout à fait exclus des salles obscures

Ce serait une belle histoire, celle d'un cinéma qui, renaîtrait. Lentement. Doucement. Mais sûrement, comme veulent le croire certains cinéphiles. Ce cinéma serait celui de Cristi Puiu (La mort de Monsieur Lazarescu), de Corneliu Porumboiu (12: 08 East of Bucharest) ou de Cristian Mungiu (Quatre mois, trois semaines et deux jours).

«Il y a une mouvance avec le cinéma roumain», confirme le programmateur du Festival du Nouveau Cinéma, Claude Chamberlan, avant de citer l'Argentine. Le point commun entre La vie des autres (Allemagne), After the Wedding (Danemark), El violin (Mexique)? «Ce sont des films, des cinémas, qui ont une vision très personnelle», croit-il.

L'an dernier, les publics se sont tournés un peu plus vers leurs cinémas nationaux. «L'exception culturelle» française a encore frappé: pour la première fois depuis 1984, les films français gagnaient plus de part de marché que les films américains, tout en attirant un peu plus de spectateurs qu'Hollywood: 44,7% des entrées pour les films français, contre 44,2% pour les films américains.

En Allemagne, dans la foulée d'Au revoir Lenine, Cours Lola cours ou encore La chute, de plus en plus de petits producteurs se lancent dans l'industrie. En Italie, le public revient vers ses films nationaux. Et en Corée du Sud, le cinéma national attire toujours deux fois plus de spectateurs que le cinéma américain.

«C'est le rejet plus ou moins conscient d'une homogénéisation du cinéma vers le cinéma de divertissement, estime le vice-président de Séville Pictures, Pierre Brousseau. Les cinémas nationaux sont à maturité et parviennent à trouver des soutiens financiers et culturels. Ce n'est pas de la télé sur grand écran.»

La revanche des «petits cinéastes, venus de petits pays», comme l'a dit Stephen Frears à Cannes, ne doit pourtant pas tout au seul enthousiasme de son public ou aux talents créatifs des ses artisans, mais bien aux législations et aides au financement les entourant. L'offensive hollywoodienne étant d'autant plus forte que les recettes des studios proviennent, depuis cinq ans, majoritairement des marchés internationaux.

«Il faut que les cinémas soient protégés, quels que soient les moyens mis en oeuvre, croit Charles Tremblay, le directeur général de Métropole Films. Il faut des mesures drastiques, sinon, c'est impossible de tenir la compétition avec les films hollywoodiens. Sans la SODEC et Téléfilm, il n'y aurait pas cinématographie québécoise.»

Cinéma national vs américain

Les cinéma nationaux ne sont pas tous aussi vigoureux. Voici les parts de marché de certains cinémas nationaux dans leur pays, en 2006.

États-Unis 90,7%

Corée du Sud 64,2%

Japon 53,2%

France 44,7%

Italie 26,2%

Allemagne 25,8%

Hongrie 18,7%

Québec 11,7%

Roumanie 4,27%

Canada 4,2%

Source: Focus 2007. Tendances du marché mondial du film.