Peut-on parler de phénomène? À vous de juger: après deux courts métrages, Anne-Sophie Dutoit, âgée de seulement 16 ans, entreprendra le tournage de son premier long métrage cet automne à Los Angeles avec un budget d'environ 1 million US.

Son court métrage Marked lui a valu le prix de la meilleure jeune cinéaste au Festival de Swansea en Grande-Bretagne. Kara's File, son deuxième court, sera projeté en fin de semaine au Cinéma du Parc dans le cadre du Festival de film YoungCuts, qui se déroule jusqu'au 23 août.

Non, il ne s'agit pas d'un conte de fée. Et oui, pour mettre les choses au clair, Anne-Sophie est la petite-fille de Charles Dutoit, maestro de l'OSM de 1977 à 2002. Vivant à Los Angeles depuis trois ans, la jeune artiste a reçu La Presse dans l'appartement que conserve le célèbre chef d'orchestre à Montréal.

«Je rêve de faire un film où il dirigerait l'orchestre qui joue la trame sonore», avoue la jeune cinéaste, qui n'a toutefois pas eu besoin de grand-papa pour faire sa place dans le monde des arts.

Déjà actrice et scénariste il y a deux ans, elle s'inscrit à un cours intensif sur la réalisation aux Studios Universal. Elle y tourne son premier court métrage. Ce sera sa seule formation en cinéma. Diplômée du secondaire, elle s'inscrira au college en septembre, mais à temps partiel.

Entourée d'un père qui a travaillé à Téléfilm Canada à Montréal et d'une mère comédienne, Anne-Sophie Dutoit a créé sa propre maison de production. Pragmatique et déterminée, elle a déjà son équipe de tournage attitrée, dont un compositeur, un directeur photo italien et une amie comédienne, Véronique Pierre.

En visite pour quelques jours à Montréal, l'artiste canado-américaine compte bien revoir ses copines d'enfance avec lesquelles elle a tourné ses premiers vidéos. «J'ai toujours été fascinée par le cinéma. Quand j'étais à Lorraine, je faisais des films avec mes amis, des pièces de théâtre. J'ai écrit mon premier petit scénario en deuxième année», raconte-t-elle.

Anne-Sophie dit aimer les histoires d'amour au cinéma, comme celle du Titanic, mais son film québécois préféré est L'Odyssée d'Alice Tremblay. Son long métrage racontera donc une histoire d'amour dramatique. «Je fais quelque chose avec l'émotion qu'on retrouve dans les films européens, mais avec un rythme américain. C'est un nouveau genre», souligne-t-elle.

Anne-Sophie Dutoit n'a rien d'une jeune diva. Elle raconte que les portes ne se sont pas ouvertes par magie devant elle. «Mais quand on me dit non, cela entre par une oreille et sort par l'autre», fait-elle en ricanant.

Et le premier long métrage ne sera pas le dernier, semble-t-il. Sa compagnie négocie les droits de deux romans, dont un britannique qui nécessiterait un budget cinéma de 35 millions... puisqu'il s'agit d'un film d'époque.

Ouf! Mais Anne-Sophie sourit. Elle dégage déjà l'assurance d'une artiste accomplie. «Moi mon but, c'est vraiment d'inspirer les gens, dit-elle. Je crois qu'il n'y a pas d'âge, ni de limites quand on aime ce que l'on fait.»