Il nous reste encore cinq films à voir dans la compétition mondiale avant le dévoilement du palmarès lundi.

Bon d'accord, quatre. Les journalistes ont en effet eu l'occasion de visionner hier Un secret de Claude Miller, sélectionné pour la clôture. Comme la première présentation officielle de ce film n'aura lieu que demain, nous retiendrons ici nos commentaires. Puisque nous en sommes dès maintenant aux pronostics, on peut quand même dire que le nouveau film du réalisateur de La petite Lili devrait, en principe, figurer au palmarès...

On le répète souvent, rien n'est plus imprévisible que la décision d'un jury dans un festival de cinéma. À Montréal, ils ne sont de surcroît que six membres cette année, sous la présidence du producteur américain James B. Harris. Outre le producteur, trois actrices (Kang Su-Yeon, Mia Maestro et Denise Filiatrault), un journaliste (Javier Angulo Barturen) et une cinéphile (Nathalie Katinakis) auront la tâche de composer le palmarès. À six, qui tranchera en cas d'égalité?

Cela dit, il n'y a pas vraiment eu de films déshonorants cette année en compétition. Les innommables navets qui ont souvent gâté le menu au fil des ans se font désormais plus rares. Bonne idée, à cet égard, que d'avoir réduit à 20 le nombre de productions inscrites dans le volet compétitif. Quand même, les choix qu'ont faits les programmateurs ne témoignent pas d'une véritable ligne directrice. On trouve même un peu de tout et n'importe quoi. De la production fauchée venue du Tchad (Tartina City) jusqu'à la comédie populaire québécoise (Surviving My Mother), la sélection est allée dans tous les sens cette année. Et s'est forcément révélée inégale.

S'il y a un film qui devrait toutefois faire l'unanimité au sein du jury, c'est Ben X, le premier long métrage du Belge Nic Balthazar. Nous n'avions en effet pas été témoin d'un tel engouement depuis des années pour un film présenté en compétition.

En toute logique, ce drame bouleversant devrait pouvoir aspirer aux plus grands honneurs. Il est sans contredit l'un des candidats les plus sérieux pour le Grand Prix des Amériques. Rappelons que Ben X est ce très beau film dans lequel un jeune homme souffrant d'une légère forme d'autisme organise un plan pour affronter le monde en jouant à des jeux vidéo sur internet. A Outra Margem (L'autre marge), du Portugais Luis Filipe Rocha, et Un secret pourraient aussi prétendre à la récompense suprême.

Il sera par ailleurs intéressant de voir ce que le jury fera de Surviving My Mother. Très réussie, cette comédie dramatique d'Émile Gaudreault ne correspond en rien au genre de films habituellement primés dans les festivals internationaux. Que faire, alors, avec ce crowd pleaser?

Complètement à l'opposé du spectre, Toi, de François Delisle, pourrait aussi être retenu par le jury si celui-ci a envie de défendre une démarche artistique exigeante. Encore là, rien n'est joué.

Fatalement, les membres du jury devront aussi choisir les lauréats des prix d'interprétation parmi les comédiens qui se sont distingués dans les quelques films qui ont tenu le haut du pavé. Cette année, les candidates sont toutefois plus nombreuses que les candidats. Anne-Marie Cadieux (Toi) doit certainement figurer parmi les favorites. Mais il y a aussi Paz Vega (Teresa), Cécile de France (Un secret), Caroline Dhavernas (Surviving My Mother) et, si le jury veut aussi honorer des rôles de soutien, Véronique La Flaguais (Surviving My Mother) et Sylvia Miles (Go Go Tales). Du côté des hommes, c'est un peu plus limité. Greg Timmermans, la tête d'affiche de Ben X, et Tomas Almeida, l'irrésistible interprète d'un ado souffrant du syndrome de Down dans L'autre marge, partent assurément avec une longueur d'avance. Reste maintenant à voir si les quatre derniers films de la compétition viendront mêler les cartes...

Retour de guerre

Otets (Père), seul film présenté en compétition hier, est un drame russe. On y explore les conséquences de la guerre à travers le désarroi intime d'un soldat. Après la capitulation des Allemands en 1945, Alexei (Alexei Gousskov) est de retour chez lui mais il a beaucoup de mal à survivre au quotidien, notamment en tant que père et mari.

Les personnages sont bien dessinés. L'atmosphère est bien recréée, et les images bellement composées. Le cinéaste Ivan Solovov, qui porte ici à l'écran une nouvelle d'Andreï Platonov, ne semble toutefois pas être allé au bout de sa proposition. Le dénouement, très appuyé, ne laisse pas une grande impression non plus. Dommage.

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Otets (Père) d'Ivan Solovov.
Aujourd'hui à 16h30 au cinéma Impérial.