Pour leur première collaboration à l'écran, Jennifer Lopez et Marc Anthony s'attardent à l'histoire d'Hector Lavoe, le parrain de la salsa. À travers le parcours du chanteur portoricain, les deux vedettes honorent leur héritage culturel.

Comme bien des compatriotes de sa génération, Jennifer Lopez ne connaissait au départ pas grand-chose de la culture «salsa». De son côté, Marc Anthony, qui a contribué à sa façon à remettre le genre au premier plan, s'intéressait plus, à l'adolescence, aux artistes Motown qu'à ceux qui pratiquaient cette musique issue du bouillonnement culturel latino des quartiers hispanophones de «Nueva York». «Pour être bien honnête, c'était surtout la musique qu'écoutaient mes parents!» a-t-il déclaré au cours d'une rencontre de presse tenue à New York il y a quelque temps.

Voilà pourquoi il semblait d'autant plus logique à ces deux artistes new-yorkais issus de familles portoricaines - deux «Nuyoricains» - de faire honneur à leurs racines en portant à l'écran l'histoire du chanteur Hector Lavoe. Figure emblématique d'une communauté en mal de repères, Lavoe fut en effet celui qui est parvenu à fouetter les ardeurs identitaires latines de ceux qui, comme lui, ont un jour dû quitter Porto Rico pour aller s'installer dans la Grosse Pomme. Grâce à son métissage musical, il a jeté les bases d'un nouveau genre, la salsa.

Le jour où elle a reçu le scénario d'El Cantante, qui est aussi le titre d'une des chansons phare de Lavoe, Jennifer Lopez n'a d'ailleurs eu aucun doute. «C'était il y a six ans, rappelle-t-elle. Je n'y voyais même pas encore un rôle pour moi à ce moment-là. Tout ce que je savais, c'est que je voulais entreprendre une carrière de productrice avec ce film!»

Même si elle ne formait pas encore un couple avec Marc Anthony à cette époque, l'actrice chanteuse ne voyait que ce dernier pour se glisser dans la peau de cet artiste torturé. Extraordinaire showman sur scène, Lavoe était d'un tempérament autodestructeur dans la vie. Accro à l'héroïne, il devait d'ailleurs mourir du sida à l'âge de 46 ans.

Au fil des réécritures, le scénario s'est progressivement transformé afin que l'histoire du chanteur soit racontée par sa femme Puchi. Cette dernière a partagé la vie du chanteur pendant une vingtaine d'années. Son existence - elle est morte en 2002 - est aussi le sujet de quelques documents d'archives. Jennifer Lopez y voyait ainsi une occasion de partager l'écran avec celui dont elle est tombée amoureuse il y a quelques années.

«Dieu merci, notre relation de couple n'est pas aussi malsaine! commente-t-elle. Puchi et Hector éprouvaient un amour profond l'un pour l'autre mais leur relation était parfois très destructrice. Cet amour les a uni mais les a aussi conduits à leur perte.»

La réalisation du film a été confiée au réalisateur d'origine cubaine Leon Ichaso. Reconnu notamment pour Pinero (présenté au FFM en 2001), le cinéaste s'était déjà intéressé aux communautés latines américaines en élaborant Crossover Dreams dans les années 80. Ce document explorait leurs racines musicales. «Quand j'ai montré ce film à Jennifer, elle a tout de suite su comment El Cantante pouvait prendre forme, révèle le cinéaste. Ce document lui a permis de mettre l'histoire de Lavoe dans son contexte historique.»

De nombreuses séquences musicales

Si, de son côté, Marc Anthony connaissait déjà les grandes lignes de la vie d'Hector Lavoe (il a même eu l'occasion de rencontrer ce dernier quand il était ado), le film lui a permis de creuser un peu plus la complexité de l'artiste sur le plan humain.

«C'est sur cet aspect que je me suis surtout concentré. Je ne voulais surtout pas que ce film devienne une musicographie comme on en voit des dizaines à la télé. La scène était sans contredit l'endroit où Hector se sentait le mieux.»

Forcément, El Cantante comporte de nombreuses séquences musicales, dont plusieurs ont été captées en spectacle.

Contrairement à ce qu'on pourrait croire au premier abord, ce sont pourtant ces scènes qui, pour Anthony, se sont révélées les plus difficiles à camper.

«Cet aspect était très délicat car je me devais d'interpréter les chansons à la manière d'Hector, explique-t-il. J'ai disséqué son style, j'ai étudié les documents d'archives, j'ai répété comme un fou. Je n'avais pas le droit à l'erreur sur ce plan.»

L'acteur chanteur se sentait investi d'une responsabilité d'autant plus grande qu'il sait bien l'importance qu'occupe Hector Lavoe dans l'imaginaire collectif de la communauté portoricaine.

«Sur le plan culturel, l'histoire de Lavoe mérite d'être racontée au même titre que celles de Jim Morrisson, Ray Charles ou Johnny Cash», ajoute-t-il.

Présenté en primeur au Festival de Toronto l'an dernier, commercialisé ensuite en salle aux États-Unis cet été, El Cantante, plutôt éreinté par la critique, ne devait même plus prendre l'affiche en salle à Montréal.

Le distributeur a toutefois décidé de sortir le film de son chapeau à la toute dernière minute afin de souligner le passage du célèbre couple dans la métropole québécoise la semaine prochaine. Jennifer Lopez et Marc Anthony sont en spectacle au Centre Bell le 12 octobre.

El Cantante prend l'affiche demain en version originale seulement.

Les frais de voyage ont été payés par Alliance Atlantis Vivafilm (Picturehouse).