Depuis la fin de la série culte qui portait son nom, les spéculations allaient bon train à propos de la nature du prochain grand projet de Jerry Seinfeld. Surprise: le célèbre humoriste réapparaît sous les traits d'une abeille dans un film d'animation...

Depuis la diffusion du tout dernier épisode de Seinfeld en 1998, Jerry Seinfeld n'a pas chômé. Il a notamment repris la route pour exercer le métier qu'il préfère entre tous: stand-up comic.

Sa tournée s'est d'ailleurs arrêtée à Montréal à quelques reprises, le temps d'offrir des séries de spectacles à guichets fermés. Concepteur et vedette d'une série télévisée marquante - la meilleure de tous les temps selon TV Guide -, le célèbre humoriste est devenu une superstar dont les moindres mouvements professionnels suscitent l'intérêt de tous les bonzes de l'industrie. Dans ce milieu, les spéculations allaient bon train à propos de la manière dont la vedette gérerait son «après-Seinfeld». Une autre série à la télévision? Du cinéma? De la réalisation? La retraite?

«Je suis très heureux à faire du stand up, confie Jerry Seinfeld. Je ne ressens pas ce besoin urgent de faire du cinéma. Il ne me viendrait pas non plus à l'esprit de me lancer dans une autre série à la télévision. J'estime que Seinfeld constitue ma contribution à cet égard. Et elle est déjà imposante en terme de nombre d'épisodes. 180 émissions, c'est beaucoup!»

Le retour de Jerry Seinfeld à l'avant-scène vient du champ gauche: un film d'animation dont il a réglé les moindres détails sur le plan de la conception, de l'écriture et de l'interprétation. Personne n'aurait pu le prévoir. Pas même lui. Quatre ans de travail ont été nécessaires pour accoucher de Bee Movie (Drôle d'abeille en version française), un film dont il est aussi l'un des producteurs.

«Jamais je n'aurais pu croire qu'une petite conversation innocente avec Steven Spielberg me mènerait aussi loin!» dit-il.

Alors que les deux hommes dînaient ensemble («J'essayais de convaincre Steven de réaliser une publicité dans laquelle je devais apparaître - il a refusé!»), Jerry est parti dans l'une de ses envolées oratoires en expliquant sa fascination pour les abeilles. Sans arrière-pensée, il a ainsi soumis l'idée d'un titre de film sans pourtant avoir encore la moindre histoire pour le soutenir: Bee Movie, dont le double sens, malheureusement, est impossible à récupérer en français. Non seulement le mot Bee désigne-t-il une abeille au sens propre, mais B Movie est aussi le terme générique employé pour décrire ces films de seconde zone - les séries B - qui, jadis, meublaient les «programmes doubles» que mettaient à l'affiche les cinémas.

Des coudées franches

Même s'il n'avait qu'un titre et pas d'histoire en main, Spielberg s'est enthousiasmé pour l'idée. Le bonze a tout de suite passé le relais à son associé Jeffrey Katzenberg, notamment directeur du service d'animation du studio Dreamworks. Ce dernier ne s'est évidemment pas fait prier pour aller de l'avant. D'autant plus qu'il pourchassait Seinfeld depuis une dizaine d'années afin que ce dernier accepte de prêter sa voix à un personnage animé.

«Nous ne parvenions toutefois jamais à trouver un projet qui convenait à ma voix ou à mon type d'humour, commente Seinfeld. Quand je m'investis dans un projet, j'aime pouvoir y apporter ma couleur.»

L'humoriste a ainsi eu les coudées franches pour élaborer une histoire dans laquelle une abeille, à qui il prête sa voix, se rebelle un peu contre sa condition. Et décide d'aller voir ailleurs si elle y est.

«J'étais complètement novice dans le domaine de l'animation mais j'ai pu en apprendre les rouages très vite grâce à tous les experts qui m'ont entourés», fait remarquer Seinfeld.

Ce dernier a ainsi suivi de très près toutes les étapes du processus, allant même jusqu'à donner la réplique à ses partenaires de jeu pendant les séances d'enregistrement des voix. Renée Zellweger, Matthew Broderick, John Goodman, Chris Rock et les autres ont pu s'appuyer sur les indications de l'humoriste pour colorer leurs performances, un luxe très rare dans le domaine de l'animation.

Aujourd'hui âgé de 53 ans, Seinfeld affirme par ailleurs ne pas avoir cherché à cibler un groupe d'âge précis, pas plus qu'il ne tente d'attirer un public particulier.

«Je n'ai même jamais pensé à trouver un équilibre entre un humour destiné aux enfants et un autre destiné aux adultes, explique-t-il. Cela ne m'a même pas traversé l'esprit. Tout ce qui compte à mes yeux, c'est que le film soit drôle. Cela dit, il est certain que j'ai pris beaucoup plus de plaisir à élaborer ce projet du fait que je suis maintenant père de deux jeunes enfants. Mais ça ne change rien sur le fond. Ma situation familiale serait différente que je me serais quand même lancé dans ce projet avec autant d'enthousiasme. J'en suis convaincu.»

Bee Movie (Drôle d'abeille en version française) prend l'affiche vendredi.