C'est un peu comme si toutes les bonnes fées de France s'étaient donné rendez-vous au cinéma Publicis depuis une semaine pour célébrer la 11e année de Cinéma du Québec. D'un côté le public n'a pas fait complètement défaut malgré la grève des transports: on aura vendu près de 2500 billets au lieu des 4000 attendus. De l'autre, divine surprise: le film d'ouverture, Les 3 p'tits cochons, de Patrick Huard, a provoqué un engouement monstre chez les distributeurs français.

Dès le mercredi matin, son producteur, Christan Larouche, était bombardé de coups de téléphone. Une bonne demi-douzaine de distributeurs se sont mis sur les rangs. Des plus puissants, spécialistes des succès commerciaux, aux plus modestes, plutôt versés dans les films d'art et d'essai. La maison MK2, par exemple, qui allie l'exigence culturelle et la surface financière, est sur les rangs.

Résultat: «Le contrat sera signé vendredi ou lundi au plus tard, nous confirme Christan Larouche, joint au téléphone. Et ce ne sera pas une petite affaire: on parle de 150 à 200 salles, pour une sortie en avril ou en mai. Je savais que le film avait un potentiel en France et en Europe. Mais je ne pensais jamais que ce serait aussi rapide. Je croyais plutôt qu'on frapperait le grand coup à Berlin en février C'est vraiment à Cinéma du Québec, le soir de l'ouverture que ça s'est joué. La réaction de la salle lors de l'ouverture a été tellement enthousiaste que les principaux distributeurs parisiens en ont eu l'écho dès le lendemain matin.»

Mieux encore, Continental, le film de Stéphane Lafleur, produit par micro_scope, est lui aussi sur le point d'être vendu pour une sortie en France. «C'est un film d'un tout autre genre, qui appartient plutôt au genre d'art et d'essai, explique Christian Larouche. Une sortie à la Congorama - entre 40 et 50 salles - serait le format idéal.»

Ajoutons à la liste La Capture, de Carole Laure (projeté hier soir en clôture), une coproduction avec participation française à 20 %, qui était déjà assuré d'une sortie en juin, dans une combinaison de salles certes beaucoup plus modeste. Et le Guide de la petite vengeance, de Jean-François Pouliot, qui semble avoir de bonnes chances de trouver preneur en France.

Un succès spectaculaire pour cette 11e présentation de Cinéma du Québec, qui tranche avec les débuts longs et difficiles de ce mini-festival. Il faut dire que, pendant ces longues premières années, la formule butait sur une réalité accablante: pratiquement aucun film québécois n'était distribué en France, et dans les rares cas contraires, c'était un bide intégral. Depuis 2003, il y a eu coup sur coup trois énormes succès: Les invasions barbares et, plus surprenant, La Grande séduction, ainsi que C.R.A.Z.Y.

«C'est ce qui a fait en grande partie la différence, explique Jean Chaput, le président de la SODEC. Aujourd'hui, on assiste à une vraie synergie. Le public et les professionnels s'intéressent et viennent à Cinéma du Québec. Et ils y voient, dans les meilleures conditions possibles, devant un vrai public, des films qui attirent leur attention. C'est infiniment plus efficace que de simples projections professionnelles.»

De son côté, Christian Verbert, patron de la SODEC pour l'Europe et grand organisateur de l'événement au Publicis, ne boude pas son plaisir: «Quand on pense à la difficulté qu'éprouvent les petits cinémas à trouver un distributeur en France, c'est incroyable.»