Le Festival international du film de Salonique rend hommage à l'Américain William Klein, maître de la photographie célèbre pour ses clichés de mode ou de New York dans les années 1960 et auteur de plusieurs films, documentaires engagés ou comédies délirantes.

Une exposition retraçant son parcours photographique montre pour la première fois au public une dizaine de clichés pris en Grèce, en grands tirages, comme il les affectionne.

«Pourquoi ces photos de Grèce n'avaient-elles jamais été exposées? Elles n'étaient pas destinées à l'être. Voyez-vous je n'étais pas venu pour des photos j'étais en vacances avec ma femme, nous visitions les îles...», raconte William Klein, volontiers goguenard du haut de ses 79 ans.

Roi de la photo de rue, de l'instantané qui fige les citadins dans des poses ou des mimiques insensées, étranges, poétiques ou drôles (les obsèques de Tino Rossi à Paris sont un sommet), il a beaucoup photographié New York mais aussi la capitale française (où il vit) Rome, Tokyo, Moscou.

«Ces dernières années j'avais peur que les gens aient changé, qu'à force d'être photographiés, filmés partout dans ce Big brother qu'est devenu le monde, ils se méfient des photographes», dit-il à l'AFP.

«Mais ce n'est pas le cas. Sauf à Moscou où dernièrement j'ai eu des problèmes: je suppose que les Russes sont fatigués de leur société hyper inégalitaire, ce qui les rend agressifs. En tous cas lorsqu'ils voient un gars avec un appareil photo aujourd'hui ils lui disent d'aller se faire foutre».

C'est la photographie de mode et le magazine Vogue qui lui ont permis de se faire un nom et de financer le reste de son travail.

De ce milieu qu'il traite avec un rien de mépris («la mode était un gagne-pain», dit-il) il a fait un film, en 1966 Qui êtes-vous Polly Maggoo?, qui peignait la profession avec ironie. L'objet est rapidement devenu culte, notamment pour une célèbre séquence de défilé avec des robes métalliques.

«J'ai demandé à des amis qui faisaient des instruments de musique en métal de faire cette collection de vêtements, dont je pensais qu'elle était tellement absurde que jamais personne ne les porterait. Et pourtant quand le film est sorti, beaucoup de gens ont piqué l'idée pour faire des vêtements en métal. Ce qui m'a prouvé que dans la mode rien n'était jamais trop absurde».

Parmi les films projetés par le festival figure aussi l'étonnant documentaire sur le boxeur Mohammed Ali, Mohammed Ali the Greatest, ou Klein filme le sportif entre 1964 et 1974, caméra à l'épaule, de tout près.

«C'est Malcom X qui m'a permis de l'approcher. J'allais filmer un combat de Mohammed Ali à Miami, et dans l'avion qui m'y emmenait la seule place qui était libre était celle à côté de Malcom X, sur laquelle personne ne souhaitait s'asseoir car tout le monde avait peur de lui», raconte le photographe.

«Je m'y suis mis, j'ai discuté avec lui et nous avons rigolé pendant tout le voyage. Ensuite il m'a dit qu'il parlerait de moi à Ali et son entourage. Quand je suis arrivé à Miami la nouvelle était passée que je venais de la part de Malcom X et toutes les portes m'étaient grande ouvertes!»

Grand défenseur de la cause des Noirs américains et pourfendeur de l'impérialime de son pays - moqué dans l'une de ses comédies, Mr. Freedom - William Klein se fait grave lorsqu'il parle de la politique des États-Unis.

«Les dirigeants politiques américains m'ont toujours rendu malade, c'est pour ça que je ne vis pas dans mon pays. Mais ces dernières années ça n'a fait qu'empirer avec Bush et Cheney. Même les problèmes de racisme perdurent: regardez qui sont les victimes de l'ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans, essentiellement des Noirs pauvres. Ça ma dégoûte».