Plus de 50 ans après avoir décroché l'Oscar du meilleur acteur, l'Américain Ernest Borgnine, 90 printemps, ne veut pas entendre parler de retraite.

Cette «gueule» de Hollywood au large sourire, vu dans de multiples classiques (Tant qu'il y  aura des hommes, Vera Cruz, Le vol du Phénix...), a récemment joué dans un nouveau téléfilm où un vieillard rencontre pour la première fois pour Noël une de ses petites-filles.

Ce scénario «m'était assez familier», raconte M. Borgnine à l'AFP, en rappelant que sa quatrième femme, après leur divorce, avait monté leurs enfants contre lui au début des années 1970.

«Je me souviens être allé chercher mes enfants (...) et ma toute jeune fille m'a dit, papa, on ne veut plus te voir! Je suis parti et je ne les ai plus vus pendant des années».

«Donc, je peux me sentir concerné par l'histoire d'un homme coupé de sa famille malgré son amour pour elle, et le fait que la solitude est plus forte pendant la saison de Noël», explique-t-il.

Très récemment, ce comédien connu des trentenaires pour avoir joué le mécanicien Dominic Santini dans la série Supercopter, a connu un deuil personnel avec la disparition de son ami Delbert Mann, réalisateur de Marty (1955), comédie qui avait valu à Borgnine la statuette du meilleur acteur à Hollywood.

«Delbert était un très bon réalisateur, en ce sens qu'il ne vous laissait jamais travailler seul. Il vous considérait comme un professionnel et vous aidait à polir votre performance (scénique) plutôt que de vous dicter ce que votre performance devait être», se souvient-il.

«Et il savait aussi faire preuve d'humour pour dissiper les conflits sur le plateau. Les acteurs appréciaient vraiment sa présence».

Une philosophie que Borgnine a faite sienne et qui explique en partie sa longévité, avec largement plus de 100 films et téléfilms au compteur en 56 ans de carrière.

«J'essaie toujours d'aider autant que possible un réalisateur, même si c'est avec quelque chose de farfelu qui me vient à l'esprit. Après, c'est au réalisateur d'arranger les idées qui me viennent».

«Mais les idées devraient plus venir de votre personnage que de votre ego. Lorsque j'entends un acteur dire qu'il peut se diriger lui-même, je me dis en mon for intérieur: tu ne devrais pas être un bon acteur en premier lieu?, parce que seul un bon acteur comprend à quel point il a besoin de l'aide de tout le monde sur le plateau pour livrer une performance vraiment mémorable».

«Pour moi, jouer la comédie est très simple», ajoute Borgnine. «Il s'agit simplement de faire fonctionner son intelligence et son coeur en même temps».

Marié en cinquièmes noces depuis 34 ans, Borgnine a côtoyé les plus grands sur les tournages, comme Lee Marvin dans Les douze salopards, ou encore William Holden, Warren Oates, Robert Ryan et Ben Johnson dans le western La horde sauvage de Sam Peckinpah.

Quels conseils à de jeunes acteurs donnerait ce vétéran, l'un des derniers survivants d'une génération de comédiens hollywoodiens avec Kirk Douglas, Mickey Rooney et Olivia de Havilland?

«Décrochez un vrai boulot avant d'essayer d'obtenir un rôle», répond-t-il. «Et ne portez pas de lunettes de soleil à l'écran en pensant que ça a de l'allure. Les yeux sont le meilleur atout d'un acteur».

«Et je leur donnerais aussi le conseil du grand entraîneur de basket universitaire John Wooden, qui disait «ce qui est vraiment important, c'est ce que vous apprenez une fois que vous savez tout».