Avec le Nouveau protocole, thriller «altermondialiste» signé Thomas Vincent (réalisateur du très beau Karnaval il y a 10 ans), Marie-Josée Croze n'a peut-être pas encore décroché le super gros lot auquel elle paraît promise. La critique est extraordinairement contrastée à son sujet. Souvent très bonne, parfois très mauvaise. La moyenne restant plus que positive.

Sorti hier dans plus de 200 salles en France, le film connaît un démarrage honorable, avec 1190 spectateurs sur 30 copies pour la première séance du mercredi après-midi. À près de 40 entrées par salle, c'est à mi-chemin entre L'âge des ténèbres (24), qui fut un échec commercial, et La grande séduction (61) qui fut un triomphe dans sa catégorie. Le film de Thomas Vincent est assuré de ne pas se payer un bide, et devrait faire une carrière moyenne au box-office.

Mais, pour Marie-Josée Croze, c'est une belle occasion de rajouter une interprétation forte et remarquée à une série déjà impressionnante où, coup sur coup, elle a donné la réplique à quelques-uns des comédiens les plus brillants du moment: François Cluzet, Mathieu Amalric, Albert Dupontel et aujourd'hui Clovis Cornillac. En attendant le début du tournage de Je l'aimais, un film de Zabou Breitman tiré d'un roman d'Anna Gavalda, qui fut un gigantesque best-seller en librairie. Et où elle partagera la vedette avec nul autre que Daniel Auteuil. Peut-être un énorme succès public et critique en perspective.

Entre-temps, la révélation des Invasions barbares, à Cannes en 2003, est désormais traitée en vedette montante incontournable par les médias français. Il y a quatre jours, elle avait droit à une demi-page très flatteuse dans le Journal du dimanche, hebdo à grand tirage. Et elle fait une double page dans le dernier numéro de Paris Match. Tout le monde étant d'accord pour dire qu'elle est l'une des comédiennes les plus en demande ces jours-ci dans le cinéma français. Certains estimant qu'elle est peut-être en train de faire une carrière à la Juliette Binoche.

Le nouveau protocole est un en quelque sorte un «polar anti-labos», où un contremaître forestier (Cornillac) perd son fils dans un accident de voiture suspect. A-t-il été victime d'un médicament douteux pour lequel il servait de «cobaye»? Il croise sur sa route une jeune femme un peu dérangée et parano (Marie-Josée Croze) qui, elle, a perdu son mari de la même manière et mène la guerre contre les grands laboratoires pharmaceutiques. Un film noir et prenant où presque tous les critiques ont salué le jeu des deux comédiens. Et se sont profondément divisés sur le film lui-même. Dans la presse «intello», Télérama lui donne une très bonne note et parle d'un «thriller engagé et punchy». Libération, moins sévère que d'habitude, parle du «travail soigné de Thomas Vincent» même si «tout ça est quand même vite oublié».

Le Monde l'exécute en quelques lignes: «ennui, incrédulité, agacement». Idem pour les Inrockuptibles: «une resucée à la mode de chez nous des films contestataires US des années 70». Même les magazines de cinéma sont partagés: Première est pour, Studio est contre. Dans les grands titres de province, Le Progrès de Lyon descend le film, mais Ouest-France fait son éloge. Quant au Parisien - premier tirage en France -, il parle d'un film «bien ficelé» et lui donne deux étoiles. Tout comme le JDD, plutôt enthousiaste. Et comme L'Express.

Pour les deux acteurs, en revanche, il n'y a que des compliments: «Marie-Josée Croze joue son personnage avec une grâce borderline singulière», écrit Télérama. Elle est «parfaite», selon le Parisien. Les deux forment «un tandem plein d'humanité», dit Ouest-France. Quant à L'Express, il estime que «Cornillac est époustouflant et Marie-Josée Croze, en parano virago, n'a rien à lui envier».

Bref la «Canadienne», comme titre Paris Match, fait désormais partie intégrante du paysage français. En attendant peut-être une consécration qu'on sent imminente.