Le révolutionnaire russe Leon Trotsky a laissé sa marque au siècle dernier. Aujourd'hui, en 2008, Leon Bronstein a bien l'intention de marcher dans ses traces, au risque d'avoir l'air d'un hurluberlu. Le jeune homme est-il un illuminé ou un incompris? La Presse a visité le plateau de tournage du film Trotsky, dont l'action se déroule sur un fond d'humour.

La réincarnation de Trotsky. Voilà ce que croit être Leon Bronstein, le jeune héros tout droit sorti du dernier film de Jacob Tierney.

 

Leon Bronstein, âgé de 17 ans, est convaincu que sa destinée est déjà toute tracée. Il aspire en fait à suivre les pas de Leon Trotsky. Comment pourrait-il en être autrement? Il porte le même prénom que le révolutionnaire soviétique du début du XXe siècle. Tout comme lui, son père est propriétaire d'une usine. Et la femme qu'il convoite, Alexandra, est de neuf ans son aînée, soit la même différence d'âge qui séparait Trotsky de sa première épouse.

Lors du passage des journalistes sur le plateau de tournage à Laval la semaine dernière, l'une des scènes tournées montrait Leon sur le point de quitter en voiture la maison familiale afin de partir à la rencontre de son Lénine.

«C'est un film qui se moque de la politique, mais qui a un fond sérieux», explique Kevin Tierney, producteur du film et père de Jacob Tierney.

Le réalisateur et scénariste de Trotsky a planché sur l'élaboration de son projet de film pendant six ans. «J'ai été particulièrement intéressé par le personnage de Trotsky, indique Jacob Tierney. Surtout à mon adolescence.»

L'homme de 29 ans a décidé de passer de l'autre côté de la caméra, puisqu'il a commencé sa carrière au cinéma et à la télévision en tant qu'acteur. Il a notamment joué dans les films Josh and S.A.M. et The Neon Bible. Au petit écran, il a tenu le rôle de Greg dans la populaire télésérie Watatatow.

Trotsky raconte donc l'histoire de Leon qui, après avoir incité les ouvriers qui travaillent à l'usine de son père à faire une grève de la faim, doit s'inscrire dans une école publique. Voilà la punition qu'a décidé de lui infliger son paternel. Qu'à cela ne tienne, l'adolescent décide de poursuivre sa croisade à l'intérieur des murs de cette nouvelle école. Il fait une grève à l'école parce qu'il voudrait que l'association étudiante agisse davantage comme un syndicat en faisant autre chose que d'organiser des fêtes, raconte Kevin Tierney, qui a notamment produit Bon Cop, Bad Cop.

Jay Baruchel, qui incarne le rôle de Leon Bronstein, confie que jouer un tel personnage est un défi de taille pour lui. «Trotsky était un grand révolutionnaire.» Puis il ajoute en riant qu'il a l'impression que les vêtements qu'il porte pour camper son rôle lui donnent un air sévère: bottes noires, chemise beige, veste grise, pantalon brun.

Et dans cette quête incessante de justice sociale, Leon, qui a des relations plus tendues avec son père, aura l'appui de sa belle-mère - incarnée par Anne-Marie Cadieux -, qu'il appelle en fait maman. «Il fait une grève de la faim et elle lui apporte un sandwich, souligne la comédienne en riant. En fait, c'est comme si elle lui disait: Fais ta révolution, mais mange!», s'exclame celle qui incarne également la colorée Sylvie dans le téléroman Annie et ses hommes.

Vêtue d'un chandail mauve et parée de multiples colliers, afin de personnifier Anne Bronstein, Anne-Marie Cadieux semble attendrie par le personnage de Leon. «Il veut faire la révolution, mais personne ne le suit. Il n'est pas illuminé. Il est à la mauvaise époque.»

Geneviève Bujold, David Julian Hirsh, Colm Feore et Hélène Bourgeois-Leclerc font également partie de la distribution de ce film tourné en anglais. Cette expérience anglophone plaît d'ailleurs à Anne-Marie Cadieux. «C'est un film à la saveur anglophone montréalaise. Ça me donne la chance de travailler avec des gens avec qui je n'ai pas l'habitude de travailler», dit-elle.

Traduction française

Ainsi, Trotsky sera sous-titré en français, mais il est impossible pour le moment de savoir s'il sera également doublé dans la langue de Molière. À ce chapitre, Kevin Tierney assure qu'il est ouvert à l'idée. «Moi, je veux bien. Mais si on veut doubler, il faut que l'oeuvre ait un marché potentiel, dit-il tout en ajoutant que le film est «très canadien». C'est exportable. L'humour est très contemporain.» Le producteur espère que Trotsky pourra être présenté à l'occasion du Festival de films de Toronto, l'an prochain.

Par ailleurs, le père et le fils apprécient-ils de travailler ensemble sur ce projet? «Pour moi, c'est un stress de moins parce que mon père est vraiment un bon producteur», répond Jacob Tierney.

Kevin Tierney lance pour sa part à la blague: «C'est la première fois que j'aime autant mon réalisateur!»