Dans son esprit, il y a un «avant» et un «après» JCVD. Sous la direction du cinéaste français Mabrouk El Mechri, Jean-Claude Van Damme joue à fond la carte du deuxième degré et s'expose comme il ne l'a jamais fait auparavant.

À 48 ans, Jean-Claude Van Damme n'est plus le même homme. Il le sait depuis longtemps. Ses admirateurs, en revanche, ne le savent peut-être pas encore. Ceux qui ont continué à le suivre dans ses films d'action de série B directement sortis en DVD tiennent en effet toujours en haute estime la même image de star de films d'action, spécialiste des arts martiaux. Quand le cinéaste français Mabrouk El Mechri (Virgil) a proposé à Van Damme un thriller déjanté dans lequel il interpréterait son propre personnage, celui qu'on surnomme «The Muscles from Brussels» dans le monde anglo-saxon n'a évidemment pu résister à l'appel.

«J'y voyais enfin l'occasion de me libérer de ce qui me torturait à l'intérieur, a raconté l'acteur hier au cours d'un entretien téléphonique accordé à La Presse. Ce projet était tellement en phase avec mon état d'esprit que j'ai carrément eu l'impression qu'on coupait mon coeur en deux pour montrer ce qu'il y avait dedans!»

Au départ existait un scénario de comédie - intitulé Le roi des Belges! - auquel El Mechri n'a pas vraiment souscrit. Avant d'en accepter la réalisation, le cinéaste a en effet exigé de pouvoir réécrire le scénario, et de rencontrer Van Damme afin de saisir la personnalité d'une vedette qu'il avait eue pour idole de jeunesse.

«On m'a alors projeté Virgil, un film qui m'a beaucoup impressionné, rappelle JCVD. En même temps, je me demandais bien pourquoi ce mec, qui fait du cinéma d'auteur, pouvait bien s'intéresser à moi. Il me semble qu'il aurait normalement dû travailler avec Auteuil ou Depardieu!»

Une introspection personnelle

Le courant passe entre les deux hommes. El Mechri écrit son scénario en 10 jours. L'histoire s'articule autour de la crise existentielle de Van Damme, cristallisée à la faveur d'un hold-up dans lequel il est pris en otage, mais dont la police le croit responsable. En découle une réflexion sur la notoriété, doublée d'une introspection très personnelle.

Aux éléments propres au film d'action, l'auteur cinéaste intègre des aspects de la «vraie» vie de Van Damme, tout autant que des trucs qui ont alimenté les rumeurs au fil des ans. Réalité, fiction et jeux de perceptions s'entremêlent jusqu'au moment d'une scène-clé: Van Damme «s'élève» au-dessus de la mêlée, et il se confie au cours d'un monologue improvisé, face à une caméra qui ne capte alors plus que la mise à nu d'un homme tourmenté.

«Quand j'ai vu le film la toute première fois, j'étais seul avec le réalisateur, relate-t-il. Ce fut un tel choc que j'ai mis plusieurs jours à m'en remettre. Moi qui suis maintenant très méfiant, j'ai alors pu constater que Mabrouk ne m'avait pas menti. Il a tout fait pour que le film soit bien. Pendant les 20 ans que j'ai passés à Hollywood, jamais je ne me suis senti aimé comme ça par un cinéaste.»

Van Damme, qui compte désormais utiliser le vocable JCVD en toutes circonstances, est en tout cas enthousiasmé au point où il a l'impression que ce film marque une étape importante dans sa vie.

«Il y aura un avant et un après JCVD, dit-il. Il y aura probablement un effet sur l'image que le public et les gens du milieu ont de moi bien sûr, mais je sens surtout cette transformation par rapport à moi-même. Ce film-là m'a fait du bien à l'âme.»

Installé à Hong Kong depuis trois ans, une ville qu'il connaît depuis très longtemps et dans laquelle il se sent bien, Van Damme tourne présentement en Thaïlande un film qu'il a lui-même scénarisé, et dont il assume aussi la réalisation.

«Je n'avais pas réalisé un film depuis The Quest il y a une douzaine d'années, explique-t-il. Ce nouveau film a pour titre Full Love - je sais, cela ne fait pas très JCVD! - et ça parle d'amour, d'amitié et de dévouement. Il s'agit d'une production modeste que je finance moi-même, et dont j'assume la responsabilité de A à Z. Très franchement, je peux maintenant dire que j'aime ma vie.»

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JCVD prend l'affiche vendredi.