De quoi a-t-on besoin pour faire un film? Une bonne histoire, des acteurs passionnés, un peu de fougue et si peu d'équipement... C'est ce que pensait Jim Donovan avant de se lancer dans l'aventure de 3 saisons, son second long métrage.

«Mais j'ai réalisé que c'est plus compliqué que ça!» lance le jeune cinéaste, fils d'une agente immobilière bien connue à Québec, Noëlline Donovan.

«Je suis le mouton noir de la famille : je suis parti vivre à Montréal et en plus je fais du cinéma!» lance-t-il à la blague.

Si 3 saisons existe aujourd'hui, c'est certainement grâce à la détermination de son réalisateur, mais aussi grâce à la générosité d'un groupe d'acteurs et d'une petite équipe de tournage qui ont accepté d'être payés en différé et seulement si le film génère des profits.

 

«Je ne pourrai jamais assez remercier les gens», souligne Donovan, reconnaissant aussi envers les entreprises qui ont fourni la bière et quelques autres avantages.

Le film a été tourné avec 35 000 $ d'économies et d'emprunts. Si on ne vous le disait pas, vous ne le remarqueriez jamais à l'écran; 3 saisons est bien, bien loin de ressembler à un film d'amateurs. Petit budget, oui, mais ce sont des pros qui sont à l'oeuvre et leur façon de filmer les scènes sans artifices, mais non sans esthétisme, donne au film un caractère très authentique et très urbain.

«Mon premier film, Pure (en anglais), était stylisé à outrance. Il y avait un désir d'expérimentation. Là, j'ai eu besoin de revenir aux sources, de raconter une histoire le plus simplement possible avec un sens de l'immédiat. On travaillait avec presque rien, on a fabriqué nos propres lumières et on avait tout dans un Econoline. Comme on n'avait pas les moyens de nourrir 30 personnes, il n'y avait pas de maquilleuse ni de coiffeuse, chaque acteur était responsable de son look», raconte le cinéaste.

La spontanéité du tournage trouve aussi écho dans celle des dialogues, largement improvisés par les acteurs, qui ont pris de grands risques. 3 saisons raconte trois histoires qui s'entrecroisent, un peu comme chez le Mexicain Alejandro Gonzalez Innaritu (Babel). Il y a Carmine (Romano Orzari) et Sacha (Caroline Néron), un couple aisé qui devrait se réjouir de la naissance prochaine d'un enfant; il y a Justine et Seb, jeunes squeegees qui devront aussi composer avec une grossesse inattendue; et enfin, Decker (Franck Schorpion), un père dont la fille a été assassinée et qui cherche maintenant à se venger.

«La vie est ce qui arrive quand on a projeté quelque chose. Il y a l'idée de la fatalité et de la fragilité de la vie dans le film. Quand on devient parent, et je l'étais devenu au moment de l'écriture du scénario, on devient plus conscient de cette fragilité. Il y a la conscience de soi face à l'enfant aussi. Le film est lié à des expériences nouvelles pour moi», explique Donovan.

Le cinéaste espère que la réussite de 3 saisons convaincra les institutions de lui accorder des subventions au prochain film. Il est déterminé à faire encore des films, mais il ne se voit pas redemander à des gens de travailler gratuitement.

«Ceux qui sont venus, c'est parce qu'ils ont connecté avec le film, parce qu'ils y ont cru. Ça a commencé avec Romano qui est un grand ami et c'est une espèce de miracle si on y est arrivé. Ce n'est pas une façon de faire à long terme, ça ne crée pas une nouvelle industrie du cinéma», estime Donovan.

Son long métrage 3 saisons arrivera néanmoins sur les écrans vendredi prochain comme une belle surprise du cinéma québécois. Et si les institutions ne lui ont pas donné de coup de pouce, le public, lui, peut encore décider de le faire.