Les enfants paient cher les cruelles inégalités et le manque affectif provoqués par l'économie mondialisée, tel est le message du film Mammoth du Suédois Lukas Moodysson avec Gael Garcia Bernal, accueilli fraîchement dimanche à la 59e Berlinale.

Au quatrième jour du festival (5-15 février), trois titres sont entrés dans la course à l'Ours d'or: outre Mammoth, Rage de la Britannique Sally Potter et Gigante du jeune Argentin Adrian Biniez, 34 ans.

De son côté le Français Claude Chabrol dévoilait hors compétition son film Bellamy, un polar curieusement dépressif et bavard, avec Gérard Depardieu.

Mammoth met en scène un couple de new-yorkais à la trépidante vie professionnelle: Ellen (Michelle Williams) est chirurgien et Leo (Gael Garcia Bernal), manager à succès d'une entreprise de jeux vidéo.

Peu à la maison, ils confient leur fillette Jackie (Sophie Nyweide) aux soins affectueux de Gloria (Marife Necesito) une nounou-domestique dont les deux fils grandissent chez leur grand-mère aux Philippines.

Le montage parallèle de Mammoth juxtapose deux univers étrangers, celui de l'hémisphère sud où l'exil est une question de survie et le Nord, riche et plein d'opportunités, mais aux rythmes de travail parfois frénétiques.

«Le besoin basique d'affection est une chose universelle, mais le film montre qu'il n'est pas toujours satisfait, qu'il n'est pas forcément une priorité dans la vie des gens, mais il le fait sans juger personne», a expliqué lors d'une conférence de presse, Gael Garcia Bernal.

«Si Mammoth provoque le débat sur la façon dont on prend soin des enfants, sur les pays riches et les pays pauvres, j'en serai très content», a ajouté Lukas Moodysson, auteur de Fucking Amal montré à Berlin dans la section Panorama en 1999 et de Lilja 4-ever, sélectionné à Venise en 2002.

Mammoth a été fraîchement accueilli et même hué à la fin de la projection de presse. Des situations parfois cliché, un ton moralisateur soutenu par une dramatisation appuyée et une musique très mode et à plein volume sur un grand nombre de séquences, ont irrité une part du public.

Autre déception, Rage de Sally Potter, qui réunit Judi Dench, Steve Buscemi, Simon Abkarian et Jude Law - absent de Berlin -. Annoncé comme une satire du monde de la mode, Rage tient davantage du film branché, proche du creux univers publicitaire dont il prétend se moquer. Cette suite de sketches présente une galerie de personnages au narcissisme caricatural qui monologuent sur un ton hystérique, face à la caméra.

Mannequins - dont Jude Law, en travesti -, garde du corps, styliste, Pdg ou critique de mode (tous deux joués par Judi Dench), couturière ou livreur de pizza, tous se lancent dans d'usantes logorrhées sans queue ni tête. Une partie des spectateurs ont fui la projection de presse.

Dernier titre dévoilé dimanche, Gigante un film argentin à petit budget et à l'intrigue mince mais bien menée, a séduit par son humour singulier. Gigante est un veilleur de nuit de supermarché qui, sous son physique menaçant de colosse amateur de heavy metal, cache une âme sensible. Il tombe amoureux d'une collègue qu'il n'ose aborder.

Samedi sera remis l'Ours d'or de cette 59e Berlinale, remporté l'an dernier par Troupes d'élite du Brésilien José Padilha.