Les comédiens du film favori pour la récompense suprême sont inconnus, et plusieurs sélectionnés étaient loin d'avoir une route toute tracée vers le tapis rouge: l'année 2009 aux Oscars pourrait être celle des outsiders.

Que Slumdog Millionaire soit bien parti pour rafler l'Oscar du meilleur film constitue la plus grosse surprise de la saison. Cette oeuvre tournée avec un budget de 15 millions de dollars, dix fois moins que son principal rival Benjamin Button, a failli ne pas sortir en salles.

Le studio Warner Independent Pictures, qui devait distribuer Slumdog aux États-Unis, a mis la clé sous la porte l'année dernière, et sa maison-mère Warner Bros. a pensé à un moment diffuser le film directement en DVD, avant de conclure un accord de distribution avec son rival Fox.

La suite appartient à l'histoire: le film de Danny Boyle a remporté tous les trophées de la saison et s'approche de la barre des 100 millions de dollars de recettes en Amérique du Nord. Boyle s'est dit persuadé que son film avait un destin, comme son héros.

«Ce qui s'est passé est très étrange», a confié le cinéaste britannique lors d'un récent entretien. «En Inde, où ils croient au destin comme l'un des ressorts de la vie, ils ont vu beaucoup d'analogies dont j'ai lentement pris conscience».

«Ce qui s'est passé pour ce film m'a rendu plus respectueux de leur croyance», a ajouté Danny Boyle, en se rappelant que «beaucoup de gens disaient : «Il y a écrit Oscar là-dessus». Très cyniquement, je me disais : «Vous n'y connaissez rien». Et maintenant, ils me disent que c'est moi qui n'y connaissais rien!»

Si Danny Boyle et Slumdog Millionaire peuvent rêver d'une victoire dimanche, l'actrice Melissa Leo est simplement contente de participer.

Sélectionnée pourFrozen River, un film indépendant au budget minuscule, l'Américaine de 48 ans se retrouve en concurrence avec des superstars comme Meryl Streep, Kate Winslet, Angelina Jolie et Anne Hathaway.

Melissa Leo a reconnu que pendant le tournage du film consacré à des passeuses de clandestins sur les eaux gelées du Saint-Laurent, rien ne pouvait être plus éloigné de ses pensées que la perspective de fouler le tapis rouge devant des centaines de millions de téléspectateurs.

Elle et ses collègues ont souvent travaillé par des températures négatives. «Il n'y avait pas de caravane, nous avons utilisé une voiture comme penderie et nous nous sommes changés dans des garages, des bureaux et dans des chambres de gens généreux», a raconté l'actrice.

Même sentiment de décalage pour Richard Jenkins, nommé notamment face à Brad Pitt, Mickey Rourke et Sean Penn pour l'Oscar du meilleur acteur, lui qui n'avait jamais tenu un premier rôle avant The Visitor.

«Cela a été fou, fou dans le bon sens, et l'une des choses les plus formidables est que j'ai entendu parler de gens qui ne m'avaient pas fait signe depuis très longtemps», a expliqué le comédien de 61 ans.

Viola Davis, nommée dans la catégorie du second rôle féminin pour Doubt, a confié qu'elle était encore incrédule. «95 % des gens dans ce secteur ont un jour été au chômage, et ça m'est arrivé», a-t-elle dit.

«J'ai vécu dans des appartements infestés de souris. J'ai pesé 40 kg de plus qu'aujourd'hui et les gens me regardaient sans me voir, j'ai joué (la comédie) sur des terrains de basket... j'ai tout vu».

«Je voulais vraiment changer de vie lorsque j'étais plus jeune - la pauvreté, la vie dans un petit village - et je ne savais pas si je pouvais le faire. Mais (les Oscars) sont tout ce que j'aurais pu espérer», a-t-elle affirmé.