La sortie de Welcome, un film français sur les immigrants clandestins afghans ou irakiens qui essaient de passer de France en Grande-Bretagne, suscite une polémique, le réalisateur, Philippe Lioret, ayant établi dans des déclarations un parallèle avec la situation des juifs en 1943.

«Suggérer que la police française c'est la police de Vichy (régime collaborateur français pendant l'occupation nazie), que les Afghans sont traqués, qu'ils sont l'objet de rafles, etc., c'est insupportable», a lancé le ministre de l'Immigration Éric Besson, réagissant aux déclarations du cinéaste.

Philippe Lioret, «a plus que franchi la ligne jaune lorsque (...) il dit «les clandestins de Calais sont l'équivalent des juifs en 43»: cette petite musique là est absolument insupportable», a ajouté M. Besson sur la radio RTL.

Le réalisateur a fait ce parallèle dans un entretien à La Voix du Nord, quotidien régional du nord de la France où se regroupent près du port de Calais des centaines de clandestins notamment afghans et irakiens. Ceux-ci tentent, au péril de leur vie, de rejoindre la Grande-Bretagne en se cachant dans des camions ou containers.

«Si demain vous voulez rendre service à un mec qui n'a pas de papiers, vous tombez sous le coup d'une «aide à personne en situation irrégulière»... Dans quel pays on vit ? J'ai l'impression qu'on est en 1943 et qu'on a planqué un juif dans la cave», avait déclaré Philippe Lioret. Il dénonce dans son film l'application d'une loi punissant toute personne ayant aidé un immigré clandestin, un délit passible de cinq ans d'emprisonnement.

Welcome, qui sort mercredi dans les salles françaises après avoir été montré hors compétition au dernier Festival de Berlin, relate la plongée de Simon, un ex-champion de natation, dans le drame de ces immigrés clandestins.

Déstabilisé par son propre divorce, le maître-nageur s'attache à Bilal (incarné par le jeune Français d'origine kurde Firat Ayverdi), un adolescent irakien qui a décidé de traverser la Manche à la nage après avoir tenté en vain de passer, caché dans un camion, un sac en plastique sur la tête pour déjouer les détecteurs de gaz carbonique de la police.

Touché par sa détermination, Simon, qui lui donne des cours de natation, tente de le dissuader, mais ouvre les yeux sur le sort des immigrants clandestins et le racisme.

Le film dénonce l'attitude ambiguë des autorités françaises qui tolèrent l'aide apportée par des ONG aux migrants, mais appliquent par ailleurs une législation qui sanctionne notamment tout citoyen ayant hébergé un clandestin.

L'acteur Vincent Lindon, qui incarne Simon, a dénoncé à son tour dans le journal Le Parisien une situation où les clandestins «sont parfois traités plus mal que des chiens», disant avoir découvert à Calais «une ville en état de siège» avec des «barbelés de 5 mètres de hauteur».

Plusieurs bénévoles venant en aide aux clandestins ont été inculpés par le passé. Alors que le président Nicolas Sarkozy a intensifié la politique d'expulsions, d'autres Français ont été poursuivis pour s'être interposés dans des avions lors d'opérations musclées de reconduite aux frontières.

Le ministre de l'Immigration, Éric Besson, s'était déjà trouvé au centre d'une polémique en février, dénonçant le recours à un «langage de Deuxième Guerre mondiale» après avoir été accusé d'«officialiser la délation» en choisissant de délivrer des titres de séjour aux clandestins ayant concouru au démantèlement de filières d'immigration.