Il Divo arrive en salle à Montréal un an après avoir raflé le prix du jury au Festival de Cannes. Si le scénariste et réalisateur Paolo Sorrentino est peu connu ici, le cinéma italien contemporain lui doit beaucoup. Avec Il Divo, le cinéaste réinvente le drame historique.

Prix du jury au dernier festival de Cannes, Il Divo dresse le portrait de Giulio Andreotti, un homme politique qui a été sept fois président du conseil italien et 25 fois ministre. Mais Paolo Sorrentino est loin de nous servir un biopic classique.

Le réalisateur italien de 39 ans est plutôt de l'école de Martin Scorsese ou encore de Quentin Tarantino. Il est un maître de l'art du montage rythmé, de l'ironie et des scènes sanglantes, le tout orchestré par une musique rock imposante.

«Mon intention n'était pas de faire une biographie. Je voulais plutôt faire une sorte d'opéra rock», dit par ailleurs le scénariste et réalisateur, joint récemment en Italie.

Giulio Andreotti a été au pouvoir pendant plus de 40 ans. Insomniaque et souffrant de migraines foudroyantes, le membre du parti de la Démocratie chrétienne était un homme effacé, qui a enfoncé l'Italie dans la corruption.

Son personnage est fascinant, d'où l'ironie dans laquelle baigne le film. Andreotti est complice de plusieurs meurtres, mais refuse un cocktail au cours d'une soirée mondaine sous prétexte que c'est un «vice». Son personnage le dira lui-même: «Il y a une contradiction perpétuelle: faire le mal pour garantir le bien.»

«Il a été l'un des hommes les plus importants d'Italie. Il fait partie de l'histoire. Mais c'est aussi un homme plein de mystères et de contradictions, fait valoir Sorrentino. Il y avait beaucoup de matériel sur lui. Je devais choisir une période, la plus intéressante d'un point de vue cinématographique.»

Le cinéaste le présente à 70 ans, au début des années 90, quand la mafia lui déclare la guerre. C'est l'acteur italien Toni Servillo qui incarne le politicien. Il a joué dans les deux films précédents de Sorrentino, Les conséquences de l'amour et L'ami de la famille, qui ont aussi fait la sélection officielle de Cannes. «Toni est le meilleur, dit son réalisateur. Le film repose sur ses épaules.»

Il faut être attentif au nom des nombreux personnages pour bien suivre l'action d'Il Divo. «Mais ce n'est pas un film sur la politique italienne, c'est un film sur le pouvoir», signale Paolo Sorrentino.

«De par la nature du sujet, les perspectives d'exportation sont plutôt limitées. Souhaitons tout de même qu'Il Divo retienne l'attention de quelques-uns de nos programmateurs de festivals», a écrit notre collègue Marc-André Lussier après avoir vu le film à Cannes, l'an dernier.

Bien voilà, non seulement le film a été présenté au Festival du nouveau cinéma (FNC) l'automne dernier, il sera présenté en salle à partir de vendredi.

«Je suis content que mes films voyagent, dit Sorrentino. Ils sont en italien, donc c'est difficile de les faire sortir en salle. Je suis curieux de connaître la réaction des gens.»

À la fin de notre entretien téléphonique, le réalisateur devait participer à la cérémonie du pendant italien des Oscars. Il préside actuellement à Cannes le jury de la section Un certain regard.

«J'aime beaucoup Cannes. Le festival a propulsé ma carrière en 2004. J'en suis reconnaissant», conclut celui qui a depuis reçu plusieurs offres de producteurs américains.

Il Divo, présenté en version originale italienne avec sous-titres français ou anglais, prend l'affiche le 22 mai.