Même s'il a plus de 30 longs métrages à son actif, Claude Chabrol n'avait jamais tourné avec Gérard Depardieu. Avec Bellamy, le prolifique réalisateur rencontre enfin l'excessif acteur pour un drame déguisé en enquête policière et en hommage à Georges Brassens et à Georges Simenon.

«Cela fait longtemps que l'on se connaît et on avait quelques projets: on voulait tourner ensemble, on a déterminé une date arbitrairement et on s'y est tenus, détaille Claude Chabrol à propos de sa collaboration avec Gérard Depardieu. Ce qu'il y a, c'est que c'est la première fois que j'écris un film pour un acteur: cela a été une expérience intéressante.»

Entre Claude Chabrol et Gérard Depardieu, l'entente a été parfaite. «Je l'ai dirigé comme les autres acteurs: mon truc, c'est de leur faire trouver ce que je veux. Il me connaît bien, on se comprend à demi-mot. On a vécu un tournage quasi idyllique», se souvient Claude Chabrol.

On avait laissé Claude Chabrol avec L'ivresse du pouvoir, un film inspiré par l'un des plus grands scandales politico-financiers français. Frappé par un vieux fait divers américain, il a ensuite tourné La fille coupée en deux qui, pris dans les déboires de Christal Films, n'a jamais pris l'affiche ici. Bellamy doit lui aussi beaucoup à l'actualité régionale française.

L'inspecteur Bellamy (Gérard Depardieu) voit ses vacances troublées par l'arrivée impromptue de son jeune frère alcoolique (Clovis Cornillac) et la confession d'un homme mêlé à une sordide histoire de meurtre et d'arnaque à l'assurance (Jacques Gamblin). Bref, contrairement à ce que le titre du film peut évoquer, Bellamy ne doit rien à Maupassant.

«Paul Bellamy est un nom assez joli que j'avais vu pour la première fois dans une rue à Nantes. J'ai fait un clin d'oeil à Bel-Ami, comme ça, les gens vont croire que je continue à me taper du Maupassant», s'esclaffe le réalisateur, toujours prompt à ponctuer la conversation d'un grand éclat de rire.

Le véritable enjeu du film

L'enquête de Bellamy se révèle n'être qu'un accessoire au véritable enjeu du film, à savoir Bellamy lui-même. «Il a une volonté d'empathie envers les autres, une espèce de peur de la culpabilité, résume Chabrol. On est partis, avec ma scénariste (Odile Barski), de l'idée d'un personnage à la Maigret, qui utilise les mêmes moyens que Maigret.»

Au final, les masques tomberont non pas du visage des meurtriers, mais de celui de Bellamy, dans lequel le spectateur découvrira un personnage plus complexe que débonnaire. «Bellamy ne se rend pas compte qu'il mène une enquête sur lui-même! Finalement, on en apprend davantage sur lui que sur le meurtre», dit Chabrol.

Filmé en plein soleil du Midi, Bellamy rend aussi hommage à Georges Brassens sur la tombe duquel ses personnages viennent mourir. Brassens, aussi, qui soufflera grâce à ses chansons une plaidoirie à un avocat. «Mais ça s'est passé comme ça dans la réalité! J'en ai un peu rajouté, j'ai été tellement surpris que l'avocat se mette à chanter Les copains d'abord! Tant qu'à faire, j'ai mis dans le film une chanson qui avait un rapport avec le sujet. Mais l'histoire, elle, est vraie», garantit le réalisateur.

Visiblement enchanté par sa collaboration avec Depardieu, Claude Chabrol envisage de retravailler avec lui, ainsi qu'avec Clovis Cornillac. «C'est un acteur exceptionnel», s'enthousiasme Chabrol qui, à 80 ans, n'envisage pas de tirer sa révérence.

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Bellamy prend l'affiche aujourd'hui.