Plusieurs mois après sa sortie en Grande-Bretagne, le nouveau film de Jean-Marc Vallée fait enfin son entrée en Amérique du Nord. The Young Victoria clôturera demain le 34e TIFF.

Jean-Marc Vallée est heureux à Toronto. Au moment de cette rencontre avec La Presse, il débarquait tout juste dans la Ville reine. Il aime ce festival, ses organisateurs, l'esprit qui y règne.

«On se sent aimés ici, dit-il. Je dénote une vraie curiosité envers mon film, pas tant à cause de la nature du sujet, comme on serait d'abord tentés de le croire, mais parce que dans l'esprit des gens, The Young Victoria est le nouveau film de celui qui a réalisé C.R.A.Z.Y. Je sens une vraie fierté chez eux. C'est fou hein?»

La première nord-américaine de The Young Victoria aura lieu demain soir au TIFF. Choisi pour clôturer l'événement, le drame historique nous arrive après avoir déjà pris l'affiche en Europe. La carrière britannique du film fut d'assez belle tenue, d'autant que l'accueil critique fut en général plutôt positif. «L'aile gauche a toutefois conspué le film et l'a traîné dans la boue, fait remarquer le cinéaste. Les critiques français, eux, ont imité leurs collègues de l'aile gauche britannique!»

Vallée dit être fier de ce film, lequel compte notamment dans son équipe de production Martin Scorsese et Sarah Ferguson, la duchesse de York. Il tient toutefois à préciser que The Young Victoria n'est pas un film «de lui», mais «réalisé par lui». «Il y a là une nuance importante, dit-il. C'est d'ailleurs la mention qui apparaît au générique. Il s'agit plus ici d'un travail d'équipe. Je n'avais pas le pouvoir décisionnel sur tout. J'ai naïvement cru au début que je pourrais en faire un film plus personnel, mais j'ai vite compris les règles établies. Je n'avais pas envie de me battre. J'ai plutôt décidé de m'amuser à l'intérieur de ça.»

Le plaisir fut si grand, à vrai dire, que le cinéaste n'hésite pas à affirmer maintenant que The Young Victoria constitue sa plus belle expérience professionnelle à vie.

«C.R.A.Z.Y. a été mon Vietnam, lance-t-il. Une guerre de tous les instants afin d'essayer de donner corps à la vision que j'avais en tête, malgré le budget relativement modeste dont nous disposions. Du moins pour un film aussi ambitieux. Sur le plateau de The Young Victoria, on m'a donné tous les outils nécessaires. J'ai aussi réussi à placer trois artisans québécois dans les postes les plus importants. J'avais devant moi une distribution impressionnante, constituée d'acteurs fabuleux. Et puis, j'aimais le scénario. L'histoire d'amour me touchait beaucoup. Les problèmes familiaux dans lesquels baignait la jeune reine Victoria me faisaient beaucoup penser à ceux de C.R.A.Z.Y.

Écrit par Julian Fellowes (Gosford Park), le récit s'attarde à décrire quatre années dans la vie de celle qui devait régner sur l'Angleterre pendant 63 ans. Emily Blunt (The Devil Wears Prada), remarquable, se glisse ainsi dans la peau d'une adolescente qui, à l'âge de 18 ans, accède au trône. Et tente progressivement d'installer son autorité, malgré tous les jeux de pouvoirs qui ont lieu dans sa cour.

De facture très classique, The Young Victoria se distingue surtout par la beauté de sa réalisation, de même que par la qualité de jeu des acteurs en présence. Rupert Friend, Miranda Richardson, Jim Broadbent, Paul Bettany et Mark Strong offrent de magnifiques compositions. Point ici toutefois de réinvention à la manière de La Reine Margot (Patrice Chéreau), Marie-Antoinette (Sofia Coppola) ou Elizabeth (Shekhar Kapur). «J'en suis conscient, concède Jean-Marc Vallée. Il y a des choses que j'aurais faites autrement si j'avais été seul maître à bord - la trame musicale serait utilisée différemment - mais j'aime ce film.»

Le cinéaste compte par ailleurs déposer bientôt un projet qu'il aimerait tourner l'an prochain. «J'ai écrit un scénario original qui s'inscrit dans la suite logique de C.R.A.Z.Y. Il y a deux histoires parallèles, se déroulant à 50 ans de distance. L'une est campée en 1960; l'autre en 2010. Je suis en train de cogiter l'idée d'intégrer un personnage français parmi les personnages principaux. Nous pourrions alors coproduire avec la France et obtenir un budget beaucoup plus conséquent!»

L'auteur cinéaste ne veut pas s'avancer davantage. Il ne souhaite pas révéler l'identité des acteurs à qui il pense non plus.

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The Young Victoria prendra l'affiche au Québec au mois de décembre.