Dans l’adaptation du roman à succès de Muriel Barbery, Josiane Balasko se glisse dans la peau d’une femme cultivée ayant renoncé à tout. Pour le pur plaisir du jeu.

La jeune réalisatrice Mona Achache a pensé à Josiane Balasko dès qu’elle a lu le roman de Muriel Barbery. L’élégance du hérisson n’était pas encore un best-seller à l’époque; l’actrice a donc eu le plaisir de découvrir la richesse de son personnage à la lecture du scénario.


«En fait, j’ai tout de suite beaucoup aimé les relations qui s’installent entre les trois personnages principaux, a expliqué Josiane Balasko au cours d’une rencontre de presse tenue récemment à Paris. Ce film se situe aussi à contre-courant de la production cinématographique actuelle, dans la mesure où il n’y a ni violence ni sexe. On n’y parle que de relations humaines et de culture. Ce n’est pas fréquent de nos jours!»


Dans cette adaptation «libre» qu’a tirée Mona Achache du bouquin de Muriel Barbery, la comédienne s’enlaidit pour se glisser dans la peau de Renée Michel, concierge invisible d’un immeuble situé dans un quartier bourgeois de Paris. Même si elle tient à la discrétion, Mme Michel se fait néanmoins remarquer par deux personnes : une fillette qui planifie de se suicider le jour de son 12e anniversaire (Garance Le Guillermic) et un nouveau propriétaire d’origine japonaise (Togo Igawa) qui, tout de suite, détecte raffinement et culture chez cette personne d’apparence très sèche.


«La vie de Mme Michel est très banale, observe Josiane Balasko. Elle vit seule depuis la mort de son mari, personne ne fait attention à elle; elle est là comme un meuble. Elle s’évade en se réfugiant dans sa bibliothèque.»


En partant des réflexions d’une fillette qui préfère en finir avec la vie plutôt que de suivre une voie toute tracée, la réalisatrice Achache a pu explorer la forme du conte réaliste. Voyant le monde des adultes comme «un bocal de poissons rouges où les adultes passent leur temps à se cogner comme des mouches sur la même vitre», la petite Paloma, qui habite l’immeuble avec ses parents, devient le vecteur à travers lequel la vie se dessine d’une manière plus complexe qu’il n’y paraît. À cet égard, la rencontre avec Mme Michel se révèle déterminante.


«Il fallait trouver une astuce pour mettre en images la forme très littéraire du roman, fait remarquer la réalisatrice. Rendre visuel ce qui passait par l’écrit.»


L’idée de remplacer le journal intime que rédige Paloma dans le roman par une caméra vidéo et des dessins s’est imposée très vite. Des séquences d’animation, au cours desquelles des illustrations très pures s’animent, font écho à l’imaginaire de la fillette.


La féminité retrouvée
Josiane Balasko, qui compte plusieurs réalisations à son actif (dont Cliente, sorti l’an dernier), affirme avoir éprouvé un vrai plaisir d’actrice durant le tournage du Hérisson. La comédienne a d’ailleurs participé à l’élaboration du «look» de Mme Michel, une femme seule, inexistante aux yeux de tous, qui ne socialise avec personne, sinon en plongeant dans l’univers de Tolstoï ou en vibrant à la vue d’un film d’Ozu.


«Il n’a pas fallu faire grand-chose, à vrai dire! dit Josiane Balasko en riant. On a rallongé les cheveux et on m’a posé de faux sourcils. Je crois que cet élément est important, car il modifie le regard. Du coup, le visage se transforme aussi. Cette femme n’est pas unique, loin de là.

Personne ne la voit, mais elle a une vie intérieure très riche. J’aimais bien cette idée d’une femme qui redécouvre sa féminité à partir du moment où quelqu’un daigne la regarder.»


Le roman de Muriel Barbery ayant été un très grand succès de librairie, Mona Achache n’a pas voulu ajouter de pression inutile sur ses épaules. D’autant plus qu’il s’agit de son premier long métrage.


«Je crois que réaliser un film en fonction de ce que les gens attendent est une mauvaise idée, affirme-t-elle. Ma préoccupation principale était de rester fidèle à l’émotion que j’avais ressentie à la lecture du roman, de charmer les gens avec des personnages hors normes et improbables de la même manière que j’ai été charmée. Même s’ils vivent des situations un peu extrêmes, je peux comprendre ces gens. Ils me sont proches.»


Le hérisson prend l’affiche le 12 mars.

Les frais de voyage ont été payés par Unifrance.