Dans le cadre d'une rétrospective des films de Benoît Jacquot à la Cinémathèque québécoise, le cinéaste nous parle de son plus récent film, sensuel, violent et bouleversant: Au fond des Bois, présenté en exclusivité le 8 septembre.

Lorsque, les sourcils froncés, Benoît Jacquot vous regarde, il se peut qu'une légère crainte vous envahisse. La tête légèrement penchée, il a le regard perçant. L'homme n'en est pas moins affable. Pour son 19e film, il a retrouvé une de ses actrices fétiches, Isild Le Besco.

«Quand je la vois et surtout quand je la filme, je suis très aspiré par ce qu'elle évoque, raconte-t-il. Lorsque je fais un film, je construis une maison pour l'actrice.»

Il les gâte et elles reviennent toujours, puisqu'elles savent qu'«entre moteur et coupé, il n'y a qu'elles», dit-il. Au moment d'écrire l'histoire, il pensait déjà à «sa Chinoise blonde». Quant au personnage masculin, il l'a vu la première fois dans un film du cinéaste argentin, La Sangre Brota de Pablo Fendrik. La jeunesse et l'allure de Nahuel Perez Biscayart à la fois sauvage et angélique le convainquent. Coup de chance, il ne parlait pas un mot de français.

«C'était parfait! se rappelle-t-il. Nous avons inventé pour le personnage une langue unique à partir de l'espagnol, de l'occitan et de l'italien.»

Chez ce cinéaste polyvalent (un opéra, deux longs métrages et un téléfilm en moins de deux ans), les scénarios se préparent à l'avance. Au fond des bois était déjà écrit avant qu'il tourne son précédent long métrage, Villa Amalia.

Son nouveau film narre l'enlèvement au XIXe siècle d'une jeune fille de médecin par un homme des bois. Ce cas unique, connu aujourd'hui sous le nom de crime d'emprise mentale, lui a plu, parce que l'hypnose le passionne. Être cinéaste passe par devenir hypnotiseur.

«Un film vous endort à la vie courante pour vous permettre d'accéder à une vie intense», dit-il.

Avec son titre aussi mystérieux que poétique, Au fond des bois est une aventure sadienne. «Le film vous captive et vous capture, fait-il. S'il ne vous plaît pas, vous sortez de la salle. L'héroïne aussi peut s'échapper, sauf qu'elle essaie et n'y arrive pas.»

Là où nous pouvons voir de la haine dans ce couple dont le corps et l'esprit ne font qu'un, l'artiste voit de l'amour, «un lien si fort qu'il n'a pas de nom». Non sans plaisir, le cinéaste dénigre la vie ordinaire pour s'intéresser à la part d'enfance dans tout homme, bien qu'au fond, ce qui l'intéresse par-dessus tout, ce soit le cinéma.

Rétrospective du réalisateur Benoît Jacquot à la Cinémathèque québécoise du 8 septembre au 9 octobre.