Deux semaines avant le début du tournage de Hereafter, Cécile de France ne savait même pas encore si elle allait devoir donner ses répliques dans la langue de Molière ou dans celle de Shakespeare. Cela lui aurait été bien égal, à vrai dire. Parce que, derrière la caméra, il y a un dénommé Clint Eastwood, «à qui l'on voue un véritable culte en Europe», souligne-t-elle au cours d'une entrevue accordée à La Presse la semaine dernière à New York.

Le réalisateur d'Invictus aura finalement eu la sensibilité et l'intelligence de laisser parler les personnages français dans leur propre langue, forçant ainsi le public américain à lire des sous-titres pendant une bonne partie de son nouveau film.

«Clint travaille d'abord et avant tout sur l'humain, avec des histoires réalistes, qu'il traduit le plus fidèlement possible à l'écran, fait valoir l'actrice. Dans mon entourage, on me dit qu'il m'a choisie parce que je peux faire partie de cette famille d'acteurs qu'il aime. Il est vrai que, dans le cinéma français, on m'emploie souvent parce que j'ai quelque chose de la voisine de palier!»

L'actrice ne saura sans doute jamais vraiment pourquoi Clint Eastwood l'a choisie. Ils n'en ont pas discuté ensemble. Pas plus que du rôle, d'ailleurs. Homme de peu de mots, le cinéaste préfère laisser à tous les artisans de son film le soin de faire leur travail.

«Il fait totalement confiance aux gens avec qui il choisit de travailler, explique l'actrice. Du coup, cette responsabilité devient très stimulante. Le simple fait d'avoir gagné la confiance d'un artiste comme Clint Eastwood fait en sorte qu'on se sent immédiatement investi dans le projet. Notre boulot, en tant qu'acteur, est aussi de savoir s'adapter aux personnalités des cinéastes. Cela ne me pose pas de problèmes du tout, car je suis une bosseuse. Que ce soit pour un essai ou pour un tournage, j'arrive bien préparée!»

La vie après la mort?

Dans le cas de Hereafter, qui aborde des thèmes de nature existentielle, Cécile de France a pu approfondir le sujet de la même manière que son personnage.

«Le scénario de Peter Morgan n'apporte aucune réponse sur la question de «la vie après la mort», fait-elle remarquer. Il s'appuie uniquement sur des faits. Ce qui est très bien. De mon côté, j'ai fait les mêmes recherches que celles dans lesquelles plonge mon personnage dans cette histoire. Mes convictions personnelles n'en ont pas du tout été affectées, mais mon esprit s'est ouvert, comme mis en éveil. Je sors enrichie de cette expérience.»

Initiée au grand écran il y a 10 ans avec L'art (délicat) de la séduction, premier long métrage de Richard Berry à titre de réalisateur, Cécile de France s'est fait connaître du grand public grâce à L'auberge espagnole (Cédric Klapisch). Elle s'est imposée rapidement en prêtant son talent à d'autres cinéastes de renom, parmi lesquels Claude Miller (Un secret), Danièle Thompson (Fauteuils d'orchestre) et Xavier Giannoli (Quand j'étais chanteur). L'actrice s'apprête d'ailleurs à tourner de nouveau avec ce dernier.

«J'aime plonger dans des univers différents, dit-elle. Et puis, c'est incroyable de penser qu'on peut mettre à votre disposition des gens qui vous montrent à faire des choses que vous ne feriez peut-être pas dans votre vie. J'ai pu apprendre l'espagnol grâce à L'auberge espagnole et la guitare grâce à Soeur sourire!»

Des scènes difficiles

Sur le plateau de Hereafter, Cécile de France a pu tester d'autres limites. Son personnage survivant miraculeusement au tsunami d'il y a six ans, qui a dévasté le sud de l'Asie, l'actrice a dû s'astreindre à tourner plusieurs scènes sous l'eau.

«J'avoue que cela a été difficile. Nous avons dû tourner ces scènes-là dans un immense réservoir installé dans un studio de Londres et nous avions d'abord prévu fonctionner avec des bonbonnes d'oxygène. Peut-être à cause du fait que j'étais dans un environnement étranger, je me suis sentie plus fragile. Et ça n'allait pas. D'autant plus que j'ai dû passer neuf heures dans ce réservoir sans pratiquement pouvoir en sortir. Heureusement, je suis très bonne en apnée. Nous avons donc procédé de cette façon-là et le tournage s'est finalement très bien déroulé. À la fin, j'étais même fière de moi!»

Ayant déjà vécu l'expérience d'un tournage «à l'américaine» (Around the World in 80 Days de Frank Coraci en 2004), Cécile de France est évidemment ouverte à l'idée d'une carrière internationale, même si elle trouve déjà de très beaux rôles dans le cinéma français.

«Il m'importe de travailler avec les meilleurs cinéastes, peu importe où ils se trouvent. J'ai déjà beaucoup de chance. Bien sûr qu'une carrière internationale m'intéresse. Mais après avoir travaillé avec Clint Eastwood, la barre est maintenant très haute!»

Hereafter (Au-delà en version française) prend l'affiche le 22 octobre. Les frais de voyage ont été payés par Warner Bros.