L'événement Cinéma du Québec à Paris connaît à peu de frais un succès médiatique et professionnel remarquable. Mais il est davantage question de «rayonnement» que de chiffre d'affaires. Pour la séance d'ouverture, lundi soir, la grande salle du Forum des images, dans le grand complexe des Halles en plein coeur de Paris, était pleine à ras bord. Et l'accueil pour Une vie qui commence de Michel Monty a été enthousiaste.

Parmi les spectateurs, il y avait les personnalités québécoises prévisibles: la ministre des Relations internationales Monique Gagnon-Tremblay, la comédienne Carole Laure, «marraine» de la manifestation depuis 14 ans, l'ambassadeur du Canada, Marc Lortie, et le président de la SODEC, François Macerola. Entre autres.

Mais il y avait aussi des personnalités françaises. Forcément Marie-Christine Saragosse, vice-présidente de TV5 Europe, chaîne de télé partenaire de Cinéma du Québec. Mais d'autres également, qui n'étaient pas obligées de venir: Jean-Luc Hees, PDG de Radio France; Daniel Leconte, l'un des patrons de la chaîne Arte et producteur du film Carlos; Sylvain Garel, tête de file des Verts à Paris et spécialiste du cinéma québécois; le producteur Dominique Besnehard, ancien conseiller de Ségolène Royal.

En comparaison de ce qui se constatait pendant les 10 premières années de son existence, jusqu'à son déménagement au cinéma Publicis, en haut des Champs-Élysées, Cinéma du Québec, désormais installé au Forum des images, nage en pleine gloire. Et ça se confirme d'une année à l'autre: affluence des professionnels québécois et européens, couverture médiatique plus qu'honorable. Quelque 5000 spectateurs dans la semaine, dont la moitié payants.

Mieux que les Allemands

Si l'on compare avec la semaine du cinéma allemand, qui se tient à la même période au prestigieux cinéma Arlequin, le (modeste) Québec remporte la palme haut la main. «Et pour moins d'argent, car les Allemands invitent généreusement les journalistes français», souligne Christian Verbert, délégué de la SODEC en Europe.

François Macerola a suscité un (très) petit émoi, dimanche, en déclarant qu'il fallait «réévaluer» l'efficacité de Cinéma du Québec à l'aune de ses résultats concrets: «Je voulais simplement dire qu'il fallait continuellement revoir les détails pratiques, s'adapter à la réalité du marché, nous explique-t-il en interview. La SODEC met 500 000 $ dans l'opération. L'équivalent de notre participation au Festival de Cannes. Une somme qui n'est pas négligeable, mais qui reste plus que raisonnable pour un événement parisien. C'est un investissement qui ne vise pas la rentabilité immédiate et à court terme. Nous souhaitons bien évidemment des succès commerciaux. Mais aussi le plus grand rayonnement possible pour le cinéma québécois, au-delà des retombées économiques.»

Joli succès

Pour une manifestation de ce genre, Cinéma du Québec confirme le succès des deux ou trois dernières années. Une fois de plus, le Film français, prestigieux hebdo de la profession, lui consacre sa couverture et un dossier de six pages. Le supplément cinéma du Nouvel Observateur, la radio de France culture et des magazines de cinéma sont partenaires de l'événement. Ce qui est un joli succès.

Pour la circonstance, la SODEC invite en tout et pour tout les 15 réalisateurs dont les films sont en projection. «Les autres professionnels québécois, environ 75, viennent totalement à leurs frais, ce qui veut dire qu'ils y trouvent leur intérêt, nous dit Christian Verbert. Parmi eux, beaucoup de producteurs, qui viennent chercher des partenaires français, pour la coproduction ou la distribution. Mais aussi des comédiens, des techniciens. Cet après-midi, le compositeur Charles Papasoff a donné une «leçon de musique» devant 125 gens du métier. Nous attirons quand même 150 professionnels français et européens. Tout ça permet des rencontres, des ébauches de projets à divers niveaux. Pour les producteurs et réalisateurs, mais aussi les comédiens et les techniciens.»

Une opération donc très réussie. Mais qui vise un marché extrêmement difficile: «Le cinéma québécois est en concurrence avec 70 autres «petites cinématographies», de Belgique ou de Roumanie, qui se battent pour 7 ou 8 % du marché français, nous dit Sylvain Garel. Et ça ne s'arrange pas: même s'il y a aujourd'hui 20 longs métrages produits au Québec au lieu de 10, il n'y a guère plus de deux sorties françaises dans une année. Et rarement de vrais succès commerciaux.»

Précision de Christian Verbert: «La moyenne québécoise n'est pas si mauvaise. L'Allemagne produit 80 films par année. Il en sort quatre ou cinq en France. Tous les «petits» pays sont logés à la même enseigne.»