Après des débuts un brin somnolents sans doute inspirés par le film allemand La maladie du sommeil, la Berlinale s'est enfin réveillée hier, au troisième jour, grâce au 3D. Ou plutôt grâce au 3D de Wim Wenders et de son magnifique film Pina sur la regrettée chorégraphe allemande Pina Bausch.

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Wenders n'est pas le seul cinéaste de la sélection officielle à avoir tenté l'aventure du 3D. Hier, aux côtés de Pina, Les contes de la nuit du père de Kirikou, Michel Ocelot, et un documentaire de Werner Herzog se disputaient les faveurs de ce dimanche 3D.

Wenders a volé la vedette aux autres en exploitant le plein potentiel artistique du 3D et en créant, à partir des chorégraphies de Pina Bausch et des témoignages de ses danseurs, un film tout en mouvement et en émotion, presque plus intense et captivant que le concert de U2 en 3D.

Pourtant, ce film somptueux tourné à 60 km de Cologne, dans la ville de Wuppertal et ses environs, a failli ne pas voir le jour. À 48 heures des premiers essais techniques, en juin 2009, la chorégraphe, avec qui Wenders parlait de cette collaboration depuis 20 ans, est morte subitement. Abattu et endeuillé, Wenders a voulu tout abandonner. Les danseurs de la troupe l'ont convaincu du contraire. Pour notre plus grand bonheur. Car il est clair qu'avec Pina, le cinéaste de Paris, Texas et des Ailes du désir risque de renouer avec un succès à grande échelle.

Des Contes un brin sexistes

On ne peut en dire autant de Michel Ocelot, père des dessins animés Kirikou. Bien que ses Contes de la nuit, dessin animé qui reprend le principe du théâtre d'ombres, soit un joli film, il est aussi affreusement plaqué, statique et un brin sexiste. En introduction aux six contes, un gamin, sa copine et un cinéaste, réfugiés dans un petit cinéma de quartier, imaginent des histoires de princes loups-garous, de princesses corbeaux et de joueur de tam-tam ensorceleur. L'ennui, c'est que le héros des contes est toujours le gamin, alors que sa copine fait figure de potiche. En conférence de presse, une jeune Suisse l'a vertement rappelé au réalisateur. Pris de court, Ocelot a plaidé qu'il essayait toujours de reproduire des rapports d'égalité dans ses films mais que, si on avait perçu le contraire, il en était proprement horrifié. Et nous donc.

Herzog et les grottes Chauvet

Troisième film en 3D de la journée: Cave of Forgotten Dreams, documentaire de Werner Herzoz sur les grottes Chauvet, en Ardèche, dont les fresques découvertes en 1994 par l'équipe de Jean-Marie Chauvet datent de 32 000 ans. L'effet 3D qui nous fait littéralement pénétrer au plus profond de ces grottes étouffantes, hérissées de stalactites, est saisissant. Idem pour les magnifiques prises de vue des fresques d'animaux, tellement précises et raffinées qu'on les croirait peintes par Picasso et non par les hommes de Cro-Magnon. Mais le babillage incessant et didactique des spécialistes plombe un film qui finit par ressembler à une vidéo des Grands Explorateurs.

Si la journée d'hier était celle du 3D, les deux jours précédents étaient ceux des femmes. Trois cinéastes, l'Argentine Paula Markovitch, l'Américaine Victoria Mahoney et la Turco-Allemande Yasemin Samdereli, ont présenté des premiers longs métrages ouvertement autobiographiques en compétition. Yelling at the Sky, de Victoria Mahoney, était le plus attendu en raison de ses deux vedettes, Zoé Kravitz - fille du musicien Lenny Kravitz - et Gabourey Sidibe, rendue célèbre par son rôle ingrat dans Precious. Or, si la fille de Lenny tire son épingle du jeu, Gabourey a un petit rôle de rien du tout qui ne lui vaudra pas de nomination aux Oscars. Quant au film, il a le malheur de raconter une histoire glauque semblable à celle de Precious, mais avec moins de talent.

À ce moment-ci, la favorite chez les femmes est la réalisatrice Yasemin Samdereli, toute jeune beauté turco-allemande qui a écrit le scénario d'Almanya avec sa soeur, et qui nous offre une comédie fine et désopilante sur la première vague d'immigration turque en Allemagne dans les années 60.