Présenté en ouverture de la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, en 1986, le film Le déclin de l'empire américain célèbre son quart de siècle. 

Récompensé avec le prix de la critique internationale, le long métrage de Denys Arcand constitue un des jalons de la cinématographie québécoise. 

Ce soir, au cinéma Impérial, une soirée hommage à ce film aura lieu dans le cadre des Rendez-vous du cinéma québécois. 

La Presse a discuté de la genèse du Déclin avec quatre de ses artisans.

Roger Frappier (coproducteur avec René Malo)

Lorsque je suis devenu producteur à l'ONF, j'ai formé un comité de travail cinématographique avec trois cinéastes de l'extérieur (Denys Arcand, Léa Pool, Pierre Falardeau) et trois de l'intérieur (Jacques Leduc, Bernard Gosselin, Tahani Rached). Nous nous réunissions tous les jeudis. Au bout de quelques mois, je suis allé voir François Macerola (alors commissaire de l'ONF) avec deux textes. J'arrive dans son bureau et lui dis: «François, le comité de travail cinématographique avance vraiment très bien. On a un premier projet ici de Pierre Falardeau sur la crise d'Octobre et un second de Denys Arcand qui s'appelle Le déclin de l'empire américain et ça parle de cul.» François m'a dit: «T'as rien de plus facile? Je commence mon mandat et tu m'apportes un film sur la crise d'Octobre et un autre qui parle de cul?» Je lui réponds: «C'est comme ça que les choses ont évolué à l'intérieur du groupe.» Il m'a demandé de lui laisser lire le tout et qu'il me revenait. Trois jours plus tard, il m'a dit: «Aucun problème.» (NDLR: Octobre est sorti en 1994)

Rémy Girard (comédien - interprète de Rémy)

Lorsque j'ai lu le scénario, j'ai trouvé cela incroyable. Je me souviens d'avoir appelé Denys et de lui avoir dit que les femmes allaient me tuer. Denys m'a répondu: «Avec toi, ça va passer.» Et le personnage a été accepté. Plusieurs femmes m'ont demandé si j'étais comme cela pour vrai. Mais jamais personne ne m'a dit que j'étais un beau salaud. Encore aujourd'hui, les gens me parlent de ce film. Il y a eu un regain, 17 ans plus tard, avec le tournage des Invasions barbares. Les gens qui n'avaient pas vu Le déclin l'ont alors loué. En France, c'est devenu un film-culte. Le film est demeuré à l'affiche de 1986 à 1993! Je crois que les Français ont été impressionnés par l'impudeur des personnages.

Dorothée Berryman (comédienne - interprète de Louise)

J'ai été tellement emballée à la lecture du scénario que je me souviens où j'étais et du temps qu'il faisait! C'était mon premier grand rôle au cinéma et je me disais: «Quel cadeau ai-je entre les mains!» J'avais le goût de défendre ce personnage. C'était un beau rôle, un personnage complet. Et même si Louise est trompée par Rémy, elle est demeurée solide. C'est lui, Rémy, qui a souffert de ses décisions. À l'époque du tournage, je jouais en même temps un personnage complètement à l'opposé dans La noce, au théâtre. Chaque jour, après ma journée de tournage à Magog, un chauffeur m'amenait à Montréal jouer au théâtre et je trouvais triste de quitter le groupe.»

Yves Jacques (comédien - interprète de Claude)

En lisant le scénario, je ne voyais pas de rôle pour moi. Je ne me voyais pas en Claude (le professeur d'histoire de l'art gai). J'ai dit à Denys que j'étais homosexuel et c'est la première fois que je le disais aussi ouvertement. Denys m'a dit que c'était un rôle pour moi. Il a un talent pour le «Typecasting». C'est sa grande qualité. De plus, j'avais 29 ans et je jouais au même moment un jeune de 18 ans dans la série télévisée Poivre et sel. Et là, je devais jouer un homme de 40 ans. Je me trouvais un peu jeune pour cela. Denys m'a fait lire un livre d'Yves Navarre où cet écrivain évoquait la baisse d'énergie. Tout était question de dosage. Par ailleurs, Le déclin m'a ouvert les portes en France. Je n'avais qu'à appeler des agents de casting et leur dire que j'avais joué dans Le déclin et j'obtenais des rendez-vous.