Un chaperon rouge en âge de se marier, dont le coeur balance entre deux amoureux. Un loup devenu loup-garou. Un conte traditionnel transformé en enquête sur fond de fantastique. Après les vampires de Twilight, Catherine Hardwicke se penche sur un autre animal, lui, au sang très chaud. Rencontre avec une réalisatrice dont l'âme est restée à l'adolescence.

Huit mois après la fin de l'aventure Twilight, Catherine Hardwicke travaillait à une adaptation contemporaine de Hamlet quand elle a reçu un scénario signé David Leslie Johnson simplement intitulé Red Riding Hood. Le «little» avait été amputé. Ça a intrigué la réalisatrice qui sait si bien cerner la personnalité adolescente - comme elle l'a prouvé dans Thirteen et dans Twilight.

Il y avait aussi ce souvenir d'enfance. «Ma mère m'a fabriqué un chaperon rouge et, deux années de suite, je l'ai porté pour Halloween. Plus tard, à l'école secondaire, j'ai incarné un très vilain chaperon rouge dans une pièce de théâtre, The Red Rotten Hood», a-t-elle raconté en entrevue à La Presse.

«J'ai toujours aimé cette histoire parce qu'elle fait peur - il y a ces bois sombres, ce loup menaçant- et parce qu'elle change de signification quand vous vieillissez et que vous vous rendez compte des sous-entendus sexuels qu'elle comprend. Le rouge est un symbole puissant.» Il est la couleur du sang, celui des victimes, donc synonyme de mort; mais aussi celui des règles, lui, synonyme de vie.

Pour ces raisons, et parce qu'elle n'avait pas trouvé le financement pour Hamlet, Catherine Hardwicke a lu le scénario. D'une traite. Happée par cette variation sur une histoire très connue, qui va comme suit...

Dans un village niché dans les montagnes et à l'orée de bois sombres et touffus, vivait la jeune Valerie (Amanda Seyfried). Elle rendait régulièrement visite à sa grand-mère bien-aimée (Julie Christie) qui, elle, vivait isolée dans la forêt.

La demoiselle, souvent vêtue du chaperon rouge offert par son aïeule, était en âge de se marier. Ainsi en avaient décidé ses parents (Billy Burke et Virginia Madsen), qui l'avaient fiancée au fils du riche forgeron, Henry (Max Irons). Même si elle était depuis toujours amoureuse de Peter, un jeune et pauvre bûcheron (Shiloh Fernandez).

C'est alors que le drame frappa le village: la soeur de Valerie fut tuée par le loup qui, depuis 20 ans, exigeait des sacrifices de la part des villageois. Les animaux, sembla-t-il alors, ne lui suffisaient plus. La terreur s'empara des lieux. Grimpant d'un cran avec l'arrivée du père Solomon (Gary Oldman), mystérieux personnage bien décidé à tuer la bête. Qui, assura-t-il, n'était pas que simple loup mais un loup-garou. Créature se transformant à la pleine lune. Et apparaissant, le reste du temps, comme un villageois parmi les autres.

Le conte d'adopter alors la forme du whodunnit: qui est le prédateur?

Oeil d'esthète

Catherine Hardwicke a accepté de prendre les rênes du projet, qui lui permettrait également de créer, totalement, un monde. Chose qu'elle n'avait pas eu l'occasion de faire depuis son arrivée à Hollywood, même à travers Twilight - dont le fantastique se décline sur un monde réaliste et contemporain: «Bien sûr, on peut faire des comparaisons avec Twilight: créature fantastique, triangle amoureux. Mais à partir de là, on part dans une autre direction. Mon travail, avec Twilight, était de faire croire aux spectateurs que des vampires vivaient maintenant et que certains pouvaient même fréquenter leur école secondaire. Ici, je dois leur faire croire à un monde ancien. Je n'étais pas liée par les choses du présent, j'ai pu laisser aller mon imagination.» Alimentée par le fruit de ses recherches et par ses goûts en matière d'esthétique.

Ainsi, tout en travaillant au scénario - «Il est important pour moi de mettre mes empreintes sur l'histoire» - elle a relu ces très anciennes versions du conte où le grand méchant loup était un loup-garou. Elle s'est aussi replongée dans ce vieux livre d'architecture qu'elle chérit et où se déploient des bâtiments faits de bois, construits autrefois dans le nord de la Russie. «Or, la forêt est très présente dans le conte. Le village est construit à ses abords, il est normal que les arbres aient servi à fabriquer les maisons. D'où, aussi, la présence du bûcheron», avance-t-elle.

C'est l'ancienne architecte qui parle. L'esthète, elle, évoque Bosch et Bruegel. Elle a étudié leurs toiles. Le jardin des délices du premier, cette impression de bacchanales. Les scènes de danse, presque sauvages et pas du tout victoriennes, du deuxième. Elle a utilisé cela dans le long métrage. Mais auparavant, elle avait reproduit certaines des toiles, leur enlevant toute note de rouge. C'est ainsi qu'elle a créé la palette du film. Où la seule touche d'écarlate viendrait de la cape. De l'iconique chaperon.

«J'ai eu cette image éblouissante de la cape rouge sur la neige blanche, et j'ai su que je tenais quelque chose», dit-elle en riant de cet irrésistible rire adolescent. Impossible de la contredire. Cette image-là est dans le film. Telle qu'elle la décrit. Et, en effet, elle éblouit.

Red Riding Hood (Le chaperon rouge) prend l'affiche le 11 mars.

Les frais de voyage ont été payés par Warner Bros.