Le 26 février dernier, le film de Tara Johns, The Year Dolly Parton Was My Mom, était projeté en clôture des Rendez-vous du cinéma québécois (RVCQ). Oui, un film anglophone. Sans que personne ne sourcille ou ne s'en offusque.

La productrice Barbara Shrier sourit lorsqu'on lui fait la remarque. Le genre de sourire qui vous fait comprendre que vous n'êtes pas le premier à aborder la question, tout en exprimant la chaleur de quelqu'un qui a déjà envie de vous inclure dans son cercle d'amis.

«Je vous réponds ce que je disais toujours à mon beau-père (francophone et nationaliste) et à Pierre Falardeau, qui n'a jamais compris pourquoi il m'aimait tant, même si je brisais toujours son argumentaire: nous sommes des créateurs québécois. Nous vivons au Québec. Je suis née ici. Tara (Johns) a choisi d'y passer sa vie. J'ai passé ma vie à travailler ici.»

Sa feuille de route en témoigne. Au cinéma, Barbara Shrier a beaucoup travaillé avec des créateurs francophones. «J'ai produit plusieurs premières oeuvres de jeunes Québécois, dit-elle. J'ai produit les trois longs métrages de Francis Leclerc (Un été sans point ni coup sûr, Mémoires affectives et Une jeune fille à la fenêtre), le court métrage de Rosa Zacharie (Une éclaircie sur le fleuve), j'ai été productrice déléguée du Violon rouge de François Girard...»

On pourrait souligner son travail sur les longs métrages Un ange à la mer, L'homme idéal ou encore Cargo, autre film de François Girard.

Comme un mariage

Avec ce Dolly Parton, elle produit son tout premier long métrage en anglais. «Et même s'il avait été en roumain, je l'aurais pris, assure-t-elle. À mes yeux, la langue est secondaire à la proposition créative. Le scénario de Tara était l'un des plus beaux que j'avais lus depuis longtemps. Tara a une signature, une vision cinématographique.»

Et, foi de Barbara Shrier, elle ne saute pas sur toutes les propositions qui lui arrivent sous le nez. Lorsqu'elle se lance dans un projet de film, elle sait que c'est pour de nombreuses années. En conséquence, elle veut que les choses se passent dans l'harmonie. «Je prends beaucoup de temps avant de dire oui, car c'est une relation qui va durer de cinq à dix ans. C'est comme se marier avec quelqu'un», dit-elle.

Estimant que la cuvée 2010 des films québécois a été «mâle et noire», Mme Shrier était heureuse que les organisateurs des RVCQ, dont elle est proche, aient pensé à son film pour la clôture de l'événement. «Ça fait du bien, un film mère-fille. Il n'y en a pas tant que ça, dit-elle. Pour moi, le film de Tara terminait ces RVCQ sur une note joyeuse.»

The Year Dolly Parton Was My Mom est aussi le premier long métrage de Tara Johns, ce dont se réjouit Barbara Shrier. «Ça fait des années que j'essaie de promouvoir la présence des femmes au cinéma. De mettre mes valeurs en pratique avec une femme cinéaste, c'était un cadeau du ciel», conclut-elle.