La technologie d'imagerie en 3D a le vent dans les voiles, du grand au petit écran, en passant par la télédiffusion en direct. Mais cette technologie demeure très coûteuse, en temps et en ressources. Dans la course vers un procédé plus efficace et économique, une petite entreprise montréalaise, I3DScope, cherche à se démarquer grâce à une entente de partenariat, dévoilée jeudi dernier, avec le distributeur américain Kings Road Entertainment.

I3DScope, qui emploie une quinzaine d'employés à Montréal, voit grand. Le marché à exploiter est immense, indique Pierre Trudeau, vice-président d'I3DScope, et les solutions encore limitées.

«L'an dernier, Warner Brothers a dû annuler la sortie 3D du dernier Harry Potter à la dernière minute parce que la conversion n'avait pas été terminée dans les délais, a-t-il affirmé en conférence de presse. Ça représente des pertes estimées à près de 100 millions de dollars.»

Selon le vice-président, une telle conversion peut prendre jusqu'à quatre mois pour un long métrage, et employer plus de 350 personnes. La technologie mise au point par I3DScope, baptisée 3D SENS Pro, dont les détails sont du registre du secret industriel, ne raccourcit pas forcément les délais, mais elle nécessite seulement une vingtaine d'employés, pour un résultat qualifié de haute qualité.

Un partenariat opportun

Or, maintenant qu'elle a conçu sa solution technologique, I3DScope fait face à un autre défi: vendre ses services aux studios de cinéma, aux chaînes télé et aux câblodistributeurs. Pour y parvenir, on croit avoir trouvé le bon partenaire en Kings Road Entertainment. L'entreprise québécoise a profité de l'aide du Bureau du cinéma et de la télévision de Montréal, ainsi que de son antenne à Los Angeles, pour favoriser la rencontre.

Ce producteur et distributeur de films, bien qu'établi à Hollywood, n'est pas tout à fait un joueur-clé du cinéma américain; hormis la comédie fantastique All of Me (1984), mettant en vedette Steve Martin, son catalogue contient surtout des productions de série B, allant de Kickboxer (avec Jean-Claude Van Damme) à quelques obscurs films d'arts martiaux, en passant par le film culte Slap Shot.

«On n'ira pas aux Oscars avec ça», reconnaît Pierre Trudeau.

Mais Kings Road Entertainment, qui a un tout nouveau conseil d'administration à sa tête, entend faire usage de ses nombreux contacts pour se repositionner dans le milieu du cinéma et de la télé 3D en proposant la technologie «novatrice» d'I3DScope. En parallèle, la bibliothèque de films de Kings Road Entertainment sera convertie en 3D grâce à cette technologie québécoise en voie d'être brevetée: «Pour nous, ce sera l'occasion de peaufiner notre produit», ajoute le président d'I3DScope.

La partie n'est pas gagnée. Des dizaines d'entreprises et de centres de recherche de partout luttent pour être les premiers à breveter la meilleure technologie, à offrir le meilleur rapport qualité-prix, à convertir des images sources 2D en 3D. En décembre dernier, le Centre de recherches sur les communications Canada, qui relève d'Industrie Canada, a dévoilé sa propre technologie de conversion 3D (en temps réel et en postproduction), nommée CRC-i3D.

Ces mêmes entreprises travaillent également à une technique pour convertir, pratiquement en temps réel, des images en 3D; son application est d'abord destinée aux studios qui produisent des longs métrages 3D.

«Traditionnellement, un réalisateur tournait sa scène et la revisionnait en 3D à la fin de la journée, explique Trudeau. Notre technologie permet au réalisateur de voir le résultat instantanément, et ainsi d'éviter d'avoir à retourner des scènes plusieurs jours plus tard .»

Le vice-président d'I3DScope rêve même de positionner Montréal comme plaque tournante de l'industrie de la 3D. Il affirme que divers ordres de gouvernement seraient intéressés à investir dans ce domaine et que des annonces pourraient être faites «très bientôt» en ce sens.