Il y a Michel, livreur de courrier, qui ne sait plus comment joindre les deux bouts. Et il y a Jacques, entrepreneur riche, qui claque son fric au jeu. Entre les deux, il y a un fossé océanique. Et pourtant, dans le film Le colis, de Gaël d'Ynglemare, leurs chemins vont finir par se croiser, provoquant maints rebondissements.

On pourrait présenter les choses ainsi: C'est l'histoire d'un gars qui en enlève un autre et qui demeure «pris» avec. Que fait-on dans une telle situation? Que fait-on avec un si encombrant colis?

«C'était le noeud de toute mon histoire», dit en entrevue la réalisatrice et scénariste Gaël d'Ynglemare, au sujet de son premier long métrage, Le colis.

En ses deux vedettes, Gildor Roy et Emmanuel Bilodeau, la réalisatrice voyait la matière pour tricoter un tandem loufoque et des plus différents, tant physiquement que moralement.

«Petite, lorsque je vivais en France, j'ai adoré tous les films de Francis Veber (La chèvre, Les compères, Le dîner de cons) avec Pierre Richard, Gérard Depardieu et plusieurs autres, dit cette Québécoise d'origine bretonne. J'aime cette opposition entre deux personnages.»

En effet! Dans Le colis, Michel Beaulieu (Bilodeau) est le contraire de Jacques St-Louis (Gildor Roy). Alors que le premier est un honnête travailleur vivant dans la dèche, le second est un riche entrepreneur qui se ruine au casino.

Tout sépare les deux hommes jusqu'au jour où Beaulieu accepte d'enlever St-Louis pour le livrer à Shot Gun (Jean-Marie Corbeil), genre de criminel punk néo-décadent. Or, Shot Gun étant soudainement retenu ailleurs, Beaulieu se retrouve seul avec son encombrant colis, ne sachant plus quoi en faire. St-Louis et lui vont finir par... créer des liens.

>>>Lisez l'entrevue Emmanuel Bilodeau et Gildor Roy: chimie instantanée d'André Duchesne

Rapport à la réussite

Syndrome de Stockholm inversé? Gaël d'Ynglemare rigole lorsqu'on lui pose la question. «Dans ma tête, les deux héros du film allaient se rapprocher. Ce n'est que plus tard que j'ai fait ce constat.»

Cela dit, à travers le synopsis, la réalisatrice voulait aborder la question du rapport des hommes avec la réussite.

«À la base, mon idée est venue de l'observation des hommes autour de moi, indique la réalisatrice. Chez eux, la réussite sociale devient presque une source d'oppression. Le personnage de Gildor a tout misé là-dessus, au détriment de sa vie personnelle et affective. Le personnage d'Emmanuel ne parvient pas, financièrement ni socialement, à atteindre un bon niveau de vie. Ça lui donne le sentiment d'être un loser et le rend incapable de fonctionner.»

Chez l'homme, poursuit Mme d'Ynglemare, le sentiment d'être un pourvoyeur est encore très présent. «Si ce sentiment n'est pas comblé, il n'est pas convaincu d'avoir réussi. Chez les femmes, c'est différent, peut-être en raison de la maternité», soutient-elle.

Selon elle, le rapport de personnages avec l'argent est peu abordé au cinéma, si on exclut les intrigues de la haute finance. L'occasion était bonne de le faire par l'entremise de la comédie. Pourquoi ce genre? «C'est un moyen idéal de percer le coeur des gens, répond-elle. Avec la comédie, les gens baissent la garde. Ils sont heureux. Ils rigolent. C'est donc un bon moyen pour dire ce qu'on veut dire.»