Avec Ichimei, film de samouraï du Japonais Takashi Miike, le festival de Cannes a ouvert pour la première fois la porte de sa compétition officielle à un film en 3D, un signe jugé encourageant pour les industriels du secteur.

Cette technologie, en plein boom, avait déjà eu les honneurs de la Croisette mais uniquement au cours de projections spéciales à l’instar de celle, cette année, de «Pirates des Caraïbes, la fontaine de jouvence» de Rob Marshall.

Ichimei - Hara-Kiri: mort d’un Samouraï, une fresque esthétique et violente sur les codes d’honneur de la chevalerie des samouraï dans le Japon du 17e siècle, est un remake de Seppuku (Harakiri) de Masaki Kobayashi, prix spécial du jury au festival de Cannes en 1963.

La 3D, habituellement réservée aux blockbusters américains à forte dose d’effets spéciaux, trouve ici une expression originale. Elle magnifie la géométrie des plans, tout comme l’esthétique graphique des décors.

Le combat final opposant le héros Hanshiro aux hommes de Kageyu, le chef du clan Li, sur fond d’averse de neige dans les jardins typiquement japonais de la résidence de ce dernier, est ainsi un grand moment de cinéma, conjuguant maîtrise du mouvement, beauté des cadres et jeu sur les premiers et seconds plans.

«Finalement, ce film sera sans doute apprécié par ceux qui recherchent déjà, à travers l’éclairage et les angles de prise de vue, des effets de stéréo spatiale dans le monde de la 2D», souligne Takashi Miike qui espère développer la curiosité des spectateurs sur l’intérêt du procédé.

«Je serais ravi que le public pense que ce qui pouvait être exprimé en 2D l’est aussi bien en 3D. Quant à ceux qui ne sont pas fans de la 3D, j’espère qu’ils diront: "Ouah, la 3D, ça marche!" Ce serait formidable que les gens plus âgés disent: "c’est vraiment intéressant, la façon dont ce film jaillit vers moi et m’aspire"», explique-t-il.

La 3D n’a pas révolutionné sa façon de travailler, avec «une seule différence», a-t-il confessé: «le rythme de tournage qui était légèrement plus lent que d’habitude, ce qui m’a forcé à épurer».

La projection en compétition de ce film est en tout cas considérée comme une bonne nouvelle par les industriels du secteur.

«On est très heureux», a déclaré à l’AFP Jonathan Ross, président de la section contenu et distribution chez XPand, l’un des mastodontes de la 3D, qui équipe par ailleurs les salles du festival.

«Nous considérons que c’est une reconnaissance de ce format comme un vrai medium pouvant être utilisé artistiquement, capable de renforcer le récit, l’aspect visuel d’un film et dans l’ensemble, le travail de production des oeuvres», a-t-il ajouté.

XPand espère convaincre de plus en plus de cinéastes de se tourner vers la 3D. Aki Kaurismäki, le réalisateur de Le Havre, ne sera en tout cas pas des leurs.

«Peu importe la façon de montrer les choses, la plupart des beaux et bons films sont tournés avec une très mauvaise technique, des mauvais éclairages, c’est l’histoire qui prédomine, qui est la référence», a dit le Finlandais.

«Hitchcock aussi s’était essayé à la 3D, c’était un maître mais à ce moment-là, il avait oublié son histoire parce qu’il était plongé dans la technique. C’est ce qui se passe aujourd’hui avec la 3D», a-t-il jugé.