Le cinéaste Mathieu Roy caresse le projet de tourner un film intitulé L'autre maison et librement inspiré par son père, l'ancien journaliste Michel Roy, atteint de la maladie d'Alzheimer. Et pour incarner ce dernier, le réalisateur a fait appel au grand acteur français Michel Bouquet.

«Mon père, c'est mon idole, c'est mon modèle, dit Mathieu Roy en entrevue. Il m'a enseigné de grandes valeurs comme l'intégrité dans le travail. C'est un être qui maîtrisait un vocabulaire inouï et qui, aujourd'hui, a toutes les difficultés à prononcer quatre mots les uns à la suite des autres.»

Évidemment, la dégénérescence de la qualité de vie du père affecte beaucoup le fils. «Ça me touche de le voir dépérir de cette façon, dit Mathieu Roy qui est aussi le frère du présentateur et journaliste Patrice Roy de Radio-Canada. Peut-être que le tournage du film va me libérer de tout ce que je ressens. Et puis, les gens ont peur de cette maladie. Pourtant, il faut aborder la question.»

Le film restera une fiction «librement inspirée de mon histoire familiale», indique le cinéaste qui compte déjà plusieurs documentaires à son actif, dont celui sur Bernie Ecclestone présenté la semaine dernière à la SRC et à RDI.

Pour incarner le personnage principal, Mathieu Roy et le producteur Roger Frappier de Max Films ont donc embauché Michel Bouquet, 85 ans, qui a connu une immense carrière tant au théâtre qu'au cinéma français. M. Bouquet a joué dans les films de Chabrol, Truffault, Alain Corneau (Tous les matins du monde). Il a incarné l'ancien président français François Mitterand dans le film Le promeneur du Champ-de-Mars de Robert Guédiguian.

«Michel n'est jamais venu au Québec et il a très hâte de le découvrir, dit Mathieu Roy qui a rendu visite à l'acteur avec Roger Frappier cette semaine. Nous avons de nouveau discuté du film, qu'il trouve très touchant. Il me citait par coeur des répliques de son personnage.»

Aujourd'hui âgé de 82 ans, Michel Roy a connu une grande carrière journalistique et diplomatique. À 20 ans, il est entré au journal Le Canada avant de passer à La Presse Canadienne et au quotidien Le Devoir en 1958. Au cours d'une carrière de 25 ans, il y a gravi tous les échelons jusqu'à devenir directeur intérimaire. De 1982 à 1988, il a oeuvré à La Presse. Il a été ambassadeur et chargé de mission dans divers pays arabes dans les années 90. Il est devenu président du Conseil de presse du Québec en 1997. Il souffre d'alzheimer depuis quelques années déjà.

Financement attendu

Le projet est bien parti, le scénario écrit et réécrit et l'acteur principal trouvé. Il reste la très délicate question du financement qui n'est pas réglée. Fin mai, la SODEC et Téléfilm Canada ont dévoilé les projets de longs métrages qui allaient recevoir un soutien financier au cours des prochains mois. L'autre maison ne se trouvait pas sur cette liste. Ce qui a évidemment déçu Mathieu Roy même s'il devait s'y attendre, car le projet en était à son premier dépôt.

«Je connais le fonctionnement et je ne veux pas partir en guerre, dit le réalisateur. Mais les institutions aiment les projets qui ont du rayonnement et nous avions un grand acteur français. M. Bouquet avait libéré tout son agenda de l'automne pour le tournage.»

On comprend qu'avec le refus des institutions, le tournage est reporté. Quoique MM. Roy et Frappier sont aussi à Paris dans l'espoir de trouver des coproducteurs. «Je laisse à Roger le soin de chercher des coproducteurs. Quant à Michel, il va faire le film quoi qu'il arrive», dit Mathieu Roy.