Le comédien québécois Émile Proulx-Cloutier a choisi un scénario et un personnage pour le moins originaux pour ses débuts au cinéma européen. Dans Opération Casablanca, de Laurent Nègre, il incarne un Québécois de Trois-Rivières converti à l’islam et faisant partie d’une cellule terroriste. Le tout, joué sous le signe de l’humour, un geste qu’il considère courageux.

Dans quelques semaines, le monde commémorera les événements du 11 septembre 2001 avec un déluge de cérémonies, de témoignages, de discours, de cahiers spéciaux dans les journaux, etc.


Une couche de plus s’ajoutera ainsi à la quantité déjà phénoménale d’articles, de livres, de musiques, de longs et de courts métrages, de lois, de règles, d’interprétations et autres « produits dérivés » consacrés non seulement aux attaques terroristes de ce jour-là, mais aussi à ses suites.


D’aucuns soupireront que tout a été dit et redit sur l’attentat. Peut-être.... Mais disons que de parler de terrorisme islamiste sous l’angle humoristique, comme vient de le faire le réalisateur Laurent Nègre dans son film Opération Casablanca, s’inscrit au rayon des raretés.


« Laurent a eu le courage d’aborder la question avec un humour franc », défend le comédien Émile Proulx-Cloutier qui, dans le film, devient Abdelkhani, Québécois converti à l’islam membre d’une cellule terroriste.

Cellule qui multiplie les coups d’éclat, capturant le secrétaire général de l’ONU près de Genève et ramenant dans son giron un de ses dirigeants, aux mains des autorités suisses.

Sauf que le dirigeant en question n’est autre que Saadi (Tarek Bakhari), pauvre Marocain sans papiers qui se retrouve au mauvais endroit au mauvais moment. Pis encore, Saadi doit se faire passer pour un chef terroriste arabe s’il veut sauver sa peau.

Dans cette comédie où les personnages sont nombreux et leurs réactions parfois déroutantes, l’ambiance est burlesque, les quiproquos innombrables, tout comme les clins d’œil aux films de séries B. « Il y a un ton très neuf dans le scénario, poursuit Émile Proulx-Cloutier. J’ai aimé la finesse de l’humour de Laurent, sa fraîcheur, le côté cartoonesque de son propos. »

Un méchant Québécois

Proulx-Cloutier a tout autant aimé interpréter un Québécois pas fin. Même si, donnant toujours l’impression de sortir d’une boîte à surprise, son personnage a du mal à comprendre tous les enjeux du terrorisme et a tendance à être influencé par son entourage.

« C’est la première fois que je vois un film européen où le Québécois est le méchant, observe le comédien. Je n’étais donc pas le Québécois de service avec son éternel caractère sympathique. »

Ici, le Québécois a aussi un côté universel. Il représente le fait que les terroristes ne sont pas que des islamistes ou des Arabes. « On l’a vu au cours des attentats de Londres et on l’a vu ailleurs », dit Proulx-Cloutier, rencontré quelques jours après l’horrible massacre d’Oslo perpétré par Anders Behring Breivik, un Norvégien d’extrême droite. Après le 11 septembre 2001, il y a eu toute cette paranoïa à l’endroit des Arabes. Que le cinéma prenne de telles questions à bras-le-corps et fasse tomber les clichés m’intéresse. »

Le film met aussi en scène l’humoriste Rachid Badouri, qui tient un tout petit rôle. Derrière la caméra, on retrouve plusieurs artisans québécois, dont le directeur photo Yves Bélanger (Frisson-des-collines, Cabotins, Gerry). Selon Émile Proulx-Cloutier, ce dernier a bien saisi l’univers dans lequel Laurent Nègre voulait amener le spectateur. « C’est un équilibre entre bande dessinée et réalité, expose-t-il. Laurent cultive cet imaginaire de bande dessinée. Transposé dans le film, cela donne à l’humour un côté décalé qui se rend jusqu’au public. Les différents niveaux du film, le public les décode très bien. »