La dépendance au sexe, l'immigration et la passion d'Al Pacino pour Oscar Wilde ont suscité l'enthousiasme, mais aussi parfois le dégoût dimanche à la 68e Mostra de Venise.

La dépendance au sexe avec Shame de Steve McQueen, jeune réalisateur et vidéaste britannique, l'immigration avec Terraferma de l'Italien Emanuele Crialese, et la passion d'Al Pacino pour Oscar Wilde et le théâtre avec Wilde Salome.

Dans cette oeuvre basée sur une pièce de théâtre éponyme d'Oscar Wilde, la vedette américaine reprend le concept artistique de son film Looking for Richard, mi-adaptation de Richard III de Shakespeare, mi-documentaire sur le tournage de la pièce dans le film, qui l'avait fait passer derrière la caméra en 1996.

Réalisateur, mais aussi acteur, Al Pacino part à la rencontre du célèbre écrivain irlandais, en mettant en scène sa pièce, en tournant un film adapté de la pièce et un documentaire sur tout ce travail qui l'emmène en Irlande, à Londres et dans le désert notamment.

«Je ne savais pas où j'allais. J'espérais que les connexions se fassent entre tout cela et qu'à la fin soit révélée un peu de sa personnalité», celle d'un «grand génie visionnaire exclu de son temps», a déclaré la vedette de 71 ans, cheveux mi-longs teints, chemise blanche en satin et veste bleue à fines rayures, ovationnée à son arrivée dans la salle où se tiennent les conférences de presse.

C'est une passion d'une tout autre nature qui anime le personnage principal de Shame (V.F.: Honte) du jeune réalisateur et artiste vidéaste britannique Steve McQueen, auteur en 2008 d'un premier film à succès, Hunger sur les derniers jours de Bobby Sands, leader de l'IRA.

Shame raconte la descente aux enfers de Brandon (Michael Fassbender), jeune cadre new-yorkais, addict au sexe dont le quotidien est bouleversé par l'arrivée de sa jeune soeur (Carey Mulligan). À son contact, il tente de sortir de son obsession, en vain.

Michael Fassbender est nu pendant une bonne partie du film, dans des scènes de sexe souvent violentes, filmées sans concession. «J'étais gêné parfois, mais heureusement je n'ai pas eu à les refaire», a dit l'acteur. L'acteur interprète brillamment son personnage et ses bouleversements intérieurs dans un New York mimétique de son état.

«C'est quelqu'un qui vit avec les difficultés de notre époque, qui a accès à un environnement abondant, mais s'emprisonne» dans «un contexte émotionnel et politique bien différent des années 80», a dit le réalisateur.

«Ce qui se passe avec Brandon et le sexe, c'est la même chose pour beaucoup de gens que nous avons rencontrés avec l'alcool, la cocaïne, la nourriture ou le téléphone» et «toutes ces choses s'entremêlent», a-t-il ajouté.

Bien que s'achevant sur une note d'espoir, Terraferma, de l'Italien Emanuele Crialese traite d'un autre sujet contemporain d'actualité: l'immigration clandestine.

Ce film raconte la vie d'une famille de pêcheurs d'une petite île bouleversée par l'arrivée d'une femme africaine sur une embarcation de fortune naufragée, qu'elle décide d'aider.

Le réalisateur, très applaudi, a expliqué que l'actrice qui interprète ce personnage, Timnit T. était elle-même rescapée du naufrage d'une embarcation de clandestins près de l'île de Lampedusa, au large de la Sicile.

Il a dénoncé «une confusion morale de valeurs que nous vivons tous» et «une réponse de l'État inappropriée», ajoutant: «laisser mourir des gens dans la mer va à l'encontre de toute règle de civilisation».

Au programme lundi, le 5 septembre : des trentenaires immatures dont la vie tourne à la tragédie (Dark Horse de Todd Solondz), un anti-James Bond d'après un roman de John le Carré (Tinker Tailor Soldier Spy de Tomas Alfredson) et un film de la Honkongaise Ann Hui, Tao Jie, A Simple Life, une relation entre un homme fortuné et la femme au service de sa famille qui l'a élevée.