Dans Poupoupidou, Gérald Hustache-Mathieu revisite à sa manière le mythe de Marilyn Monroe, en s'intéressant à «la petite voix fragile» de Norma Jeane. L'icône prend les traits d'une starlette de province, effigie du fromage local et miss météo sexy trouvée morte, un tube de somnifère à la main. David Rousseau, écrivain en manque d'inspiration, est persuadé qu'il s'agit d'un meurtre.

À l'évidence, c'est vers le cinéma américain que lorgne Gérald Hustache-Mathieu. Une des premières scènes de son film, dans laquelle David Rousseau (Jean-Paul Rouve) arrive dans un hôtel aux tapisseries improbables, s'inspire clairement de Barton Fink des frères Coen.

«Je ne m'en étais pas rendu compte. C'est ma scénariste qui m'en a fait la remarque. J'ai revu le film et c'est fou: la scène dans le couloir est exactement la même!» s'enthousiasme encore le réalisateur.

Qui assume plutôt l'influence de Fargo: Poupoupidou, film noir à l'humour décalé, se déroule à Mouthe, la ville la plus froide de France, enfouie sous le silence de la neige.

«Les frères Coen sont les cinéastes desquels mon travail se rapproche le plus, dit-il. Ça vient de deux choses: ils sont provinciaux et font des films de province, et ils ont ce regard cocasse, amusé, sur des personnages excentriques, qu'ils observent sans méchanceté, avec une profonde tendresse.»

De passage à Montréal cette semaine, le jeune cinéaste - il signe avec Poupoupidou son deuxième long métrage après Avril - dit avoir fait un film sur le manque de confiance en soi. Sophie Quinton, qui joue Candice Lecoeur, une pin-up de province qui s'approprie le destin de Marilyn, était pour lui une évidence.

«Les financiers n'y croyaient pas: ils trouvaient que Marilyn, c'est un cul et des seins, alors que Sophie Quinton est bien plus que cela», indique-t-il. Cette réticence a renforcé sa conviction: «Derrière Marilyn, il y a quelqu'un d'autre, il y a la femme qui doutait le plus d'elle-même au monde», rappelle-t-il.

Hustache-Mathieu évoque volontiers ses propres doutes sur sa légitimité, à cause de son milieu d'origine, la province, «un no man's land culturel». À 15 ans, il n'avait pas vu de films. Cela ne l'a pas empêché de se lancer quand, plus tardivement, il a trouvé sa voie.

«J'avais confiance en mes idées. On me disait qu'elles étaient originales. Je pensais qu'il y avait quelque chose à en tirer», dit-il sans fausse modestie.

Mélange des genres

Dans un univers apparemment froid, Jean-Paul Rouve, que le cinéaste compare à Benoît Poelvoorde, apporte une part de loufoque.

«J'avais l'excuse de mettre les situations cocasses sur le compte du personnage un peu fêlé, parce que ces scènes auraient pu être dans un de ses romans», dit-il.

Le cinéaste confirme aussi un goût prononcé pour le comique visuel.

«J'aime les situations qui peuvent paraître banales et qui, regardées avec attention, deviennent très drôles, comme chez Tati, explique-t-il. Une scène est forte si elle tient encore la route quand on enlève les dialogues.»

Un film de cinéphile, donc?

«Je n'aime pas les films intellos. Je trouve qu'il y a une forme de politesse à ce qu'un film reste accessible au plus grand nombre, parce que je viens de là. Un film abscons qui voudrait dire «vous n'êtes pas assez intelligent pour me comprendre», ça, je trouve ça d'une prétention totale», insiste Gérald Hustache-Mathieu.