Chris Kentis et Laura Lau, qui avaient fait sensation en 2003 avec le film d'épouvante Open Water, reviennent derrière la caméra avec Silent House, un film qui suit en temps réel la descente aux enfers d'une jeune femme prisonnière d'une maison obscure.

Le couple d'Américains avait marqué un grand coup en adaptant pour le grand écran l'histoire vraie d'un couple de plongeurs oubliés en haute mer par leur groupe, et condamnés à dériver dans un océan infesté de requins.

En ne montrant rien de ce qui se passait sous l'eau, mais en restant au plus près des deux personnages, Chris Kentis et Laura Lau avaient réussi à susciter la terreur uniquement par la suggestion, et leur film au budget très modeste avait récolté plus de 38 millions de dollars dans le monde.

Les studios alléchés ont vite pris les cinéastes sous leur aile, mais aucun de leurs projets n'a finalement vu le jour, jusqu'à Silent House, qui sort vendredi en Amérique du Nord.

«Nous avions plusieurs gros projets», explique Laura Lau à l'AFP. «En quelque sorte, nous avons été comme ces cinéastes indépendants qui vont à Hollywood et se retrouvent prisonniers du développement, des gros budgets et de l'économie. On n'a rien pu construire et c'était très frustrant», dit-elle.

Jusqu'à l'année dernière, quand la productrice Agnès Mentre, fan de Open Water, leur propose de réaliser une version américaine de La casa muda (La maison silencieuse), un film d'horreur uruguayen datant de 2010.

«Nous n'avions aucune idée de ce que c'était, mais elle nous a dit que le film était tourné en plan-séquence et nous avons tout de suite été excités par le défi que cela représentait», explique Chris Kentis à l'AFP.

Le film met en scène Sarah (Elizabeth Olsen, une Américaine de 23 ans très en vogue depuis son rôle dans le film indépendant Martha Marcy May Marene), une jeune femme qui se retrouve enfermée malgré elle dans une maison qu'elle restaure avec son père, et où elle se retrouve poursuivie par des inconnus.

Comme Open Water, Silent House est raconté «du point de vue des personnages principaux. L'idée du film est de vivre tout ce qui se passe dans cette fenêtre temporelle, tout ce que cette fille traverse, exclusivement à travers ses yeux», précise Chris Kentis.

Les cinéastes ont repris le principe du plan-séquence -- un long plan sans coupes et donc sans montage possible.

Et même si le film n'est pas composé d'un seul plan d'une heure trente, comme il en donne l'illusion, il n'en reste pas moins bâti sur plusieurs longs plans-séquences de plus de dix minutes, représentant un incontestable défi technique.

«Pour les acteurs, c'était clairement très difficile, et particulièrement pour Elizabeth, car elle devait non seulement créer un personnage complexe et brisé, mais aussi avoir en tête beaucoup d'aspects techniques» liés au tournage d'un plan-séquence.

Pour les cinéastes, ce procédé de tournage était parfaitement adapté à l'histoire. «Ce film dresse le portrait d'une personne très marquée. Et à cause de son instabilité psychique, son sens de la réalité est fragmenté, tout comme son identité et sa conscience du temps», explique Laura Lau.

«Comme nous la suivons en temps réel, nous pouvons savoir exactement ce qu'elle expérimente», ajoute-t-elle.

La construction en plans-séquences «était quelque chose d'intimidant, mais je pense que j'ai appris une nouvelle façon de pouvoir communiquer des idées de façon cinématographique», assure Chris Kentis.