Tout chanteur d'opéra vit dans l'angoisse de perdre la voix. C'est ce qui arrive au personnage principal de Silence, un long métrage indépendant de Michel Préfontaine, en tournage cette semaine à Montréal. Le baryton québécois bien connu Étienne Dupuis - qui tiendra le rôle-titre en novembre dans Le Barbier de Séville à l'Opéra de Montréal - y tente sa première expérience au cinéma.

Aux côtés d'Étienne Dupuis, on retrouvera Chantal Bellavance, Carl Béchard, Gilbert Turp, Jacques L'Heureux, Hubert Proulx et le baryton Gino Quilico. Michel Préfontaine, qui scénarise, réalise et produit le film, a surtout travaillé à la télévision sur des émissions musicales. Il s'agit de son second long métrage. Le premier, Medium blues, remonte à plus de trente ans.

«J'ai surtout produit des émissions pour les chaînes Bravo et TV5, en opéra et en musique classique. J'ai fait des projets avec Natalie Choquette, entre autres», dit le réalisateur.

Perdre la voix

«Ça m'est arrivé une fois dans ma vie de perdre la voix en plein spectacle, raconte Étienne Dupuis. J'avais 19 ans et je chantais dans une opérette, une production étudiante, à Laval. C'était épouvantable parce que je ne pouvais rien faire, personne ne pouvait m'aider et les spectateurs me regardaient avec pitié. Personne ne m'en a jamais reparlé, mais si on le faisait, ça me ferait encore mal.»

Si l'idée de jouer un chanteur d'opéra, son métier dans la vie, ne l'enthousiasmait pas outre mesure, la perspective de perdre la voix et de demeurer muet une grande partie du film était plus tentante, à cause du défi de jeu qu'elle représente. Au terme du tournage, il a aimé son expérience.

«J'ai trouvé ça très intense, comme un marathon. Disons que la piqûre n'est pas difficile à attraper.»

Bien qu'il s'agisse d'une production modeste, la pression est importante.

«Il s'agit d'un long métrage, et en plus, j'ai le premier rôle. Mais c'est un film sans prétention envers lequel il n'y a pas le genre d'attentes que l'on peut avoir pour le prochain film d'un réalisateur-vedette. C'est la première fois que Michel écrit un scénario et son dernier film remonte aux années 1980.»

Pour jouer Robert, un baryton français qui perd la voix pendant un séjour au Québec, quelques jours avant un récital, il a dû apprendre à travailler différemment.

«À l'opéra, on sait qu'on va faire les choses en temps réel. Il y a un ordre précis dans lequel on joue les scènes et on s'y habitue. Dans l'opéra Dead Man Walking (où il tenait le rôle principal à l'Opéra de Montréal en 2013 NDLR), je savais à l'avance par où je passerais sur le plan émotif. Dans un tournage, c'est complètement différent, car on peut recommencer plusieurs fois la même scène, puis passer à tout autre chose.»

Il doit aussi adapter son jeu en laissant de côté les exagérations opératiques.

«La caméra peut venir chercher, dans ton visage, les petites subtilités. À l'opéra, je peux exagérer les mimiques et les gestes: le metteur en scène va me dire que c'est bien comme ça, ou même, il va me dire d'en faire plus.

«Au cinéma, si j'accentue le moindrement une expression faciale, on me dit que j'en fais trop. C'est une autre façon de jouer.»

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La sortie du film est prévue en 2015.