La cinéaste Katell Quillévéré s'est déjà fait remarquer avec Un poison violent, son premier long métrage. Elle a ensuite vite atteint les ligues majeures grâce à Suzanne. Son troisième long métrage, Réparer les vivants, est une adaptation cinématographique du roman éponyme de Maylis de Kerangal. Et c'est une splendeur.

Sélectionné à la Mostra dans la catégorie « Horizons », ce film met en vedette une distribution imposante, dans laquelle on retrouve Tahar Rahim, Emmanuelle Seigner, Bouli Lanners, Kool Shen, Alice Taglioni et Dominique Blanc, mais aussi Anne Dorval dans un rôle principal et Monia Chokri dans un rôle de soutien. La réalisatrice a su tirer de chacun d'eux des compositions fines et délicates. Elle parvient aussi à cerner l'essence d'un personnage avec une rare puissance d'évocation.

Katell Quillévéré affiche également une remarquable compréhension de la réalisation. Elle propose ici un film visuellement impressionnant, duquel émanent avec discrétion de remarquables traits de mise en scène. Elle sait aussi créer l'émotion sans jamais insister, un peu comme si elle l'extirpait de la réalité de la vie. Pour l'occasion, Alexandre Desplats y est allé de l'une de ses plus belles trames musicales.

LE COEUR D'UN AUTRE

Au cours du prologue, on suit ainsi le périple de trois jeunes amis surfeurs qui profitent d'un temps agité pour tenter de trouver leur meilleure vague. Les images sous-marines sont ici d'une qualité exceptionnelle. C'est en rentrant de leur périple que le drame survient. Encore une fois, la manière qu'emprunte la cinéaste pour évoquer la scène de l'accident de voiture est exemplaire.

Deux des trois jeunes hommes survivent. La mort cérébrale de Simon est déclarée à l'hôpital. Les parents (Emmanuelle Seigner, Kool Shen) sont prévenus. Déjà en état de choc, ils doivent quand même décider rapidement du sort des organes de leur fils. Son coeur, peut-être, pourrait sauver une femme (Anne Dorval) d'une mort certaine, à plus ou moins brève échéance.

Au-delà du récit, déjà très fort, Katell Quillévéré mêle l'approche documentaire (pour l'aspect médical) aux questions plus philosophiques et existentielles. À l'arrivée, cela donne une oeuvre très maîtrisée, parfaitement bouleversante. La qualité d'ensemble de la distribution est remarquable (les rapports entre les personnages sont empreints d'une grande humanité), mais l'on se doit de souligner particulièrement le jeu d'Emmanuelle Seigner, Tahar Rahim (dans le rôle d'un médecin) et, aussi, Anne Dorval, à travers qui passe toute la charge émotive du récit.

« UNE ACTRICE D'EXCEPTION »

L'actrice québécoise n'a malheureusement pas fait le voyage à Venise. Katell Quillévéré a cependant révélé à La Presse que le choix de lui confier ce rôle relevait de l'évidence.

« À mes yeux, Anne a donné l'une des plus grandes performances d'actrice de ces dernières années. Dès que je l'ai vue dans Mommy, le film de Xavier Dolan, j'ai tout de suite eu envie de la rencontrer et de lui offrir un rôle. Anne est une actrice d'exception. »

Souhaitons maintenant qu'un distributeur québécois amène chez nous cette oeuvre cinématographique remarquable (aussi sélectionnée au TIFF), sans contredit l'une des plus belles de l'année.

photo Alessandro Bianchi, reuters

La réalisatrice Katell Quillévéré s'est prêtée dimanche à la traditionnelle séance de photos qui précède la projection des films.

photo fournie par mars distribution

Emmanuelle Seigner et Kool Shen jouent les parents éplorés.