Birdman, du Mexicain Alejandro Gonzalez Inarritu et The look of silence, de l'Américain Joshua Oppenheimer, étaient donnés favoris pour le Lion d'or, samedi à Venise, à quelques heures du palmarès de la 71ème Mostra.

Première comédie noire du cinéaste latino-américain, et favori du public, Birdman raconte l'histoire d'un acteur célèbre pour avoir incarné un super-héros mais aujourd'hui sur le déclin, et qui décide de renouer avec sa gloire passée en montant un spectacle à Broadway.

C'est Michael Keaton, qui endossa lui-même le costume du Batman de Tim Burton en 1989, qui incarne brillamment Riggan Thomson, cet acteur à la dérive sur la voie de la reconquête de son public.

L'acteur était d'ailleurs souvent cité sur le Lido cette semaine pour la Coupe Volpi qui récompense le meilleur interprète, son équivalent féminin étant volontiers attribué, dans les pronostics, à la chinoise Lu Zongh pour son rôle de veuve déboussolée dans Red amnesia, thriller signé Wang Xiaoshuai.

Face à Birdman, The look of silence, était lui le préféré des critiques italiens et étrangers pour la victoire finale dans cette édition, dont le palmarès sera révélé samedi au cours d'une soirée organisée au Palais du cinéma.

Dans ce poignant documentaire sur la sanglante épuration anticommuniste de 1965 en Indonésie, le réalisateur Américain Joshua Oppenheimer suit une famille rescapée et plus particulièrement le dernier né, Adi Rukun, âgé de 44 ans au moment du tournage et qui décide d'enquêter sur la mort de son frère aîné, mort en 1965, soit trois ans avant sa naissance.

Pourtant tous deux entrés en lice très tôt dans la Mostra, Birdman ayant même fait l'ouverture le 26 juillet, les deux favoris n'ont pas  faibli en dépit des arrivées successives, tout au long de la décade vénitienne, de «poids-lourds» comme Manglehorn, signé David Gordon Green, avec la star des stars, Al Pacino, ou encore le très attendu Pasolini, du sulfureux Abel Ferrara, mais qui a laissé jeudi le public sur sa faim.

Technique et humanisme

Vendredi encore, The postman's white nights, du russe Andrej Konchalovsky, qui a attendri le public du Lido, était considéré comme un candidat possible à une place au palmarès qui sera dévoilé par le président du jury (composé de neuf membres), le compositeur de musiques de films Alexandre Desplat, premier musicien à occuper cette fonction dans l'histoire du doyen des festivals de cinéma.

Dans un entretien à l'AFP, à quelques heures du clap de fin de la Mostra, l'auteur de la musique du Discours d'un roi a dit espérer que le Lion d'or sera un film «hors du commun» alliant «une technique irréprochable à un discours humaniste».

Vendredi, Good kill d'Andrew Niccol, qui a tenté de justifier la guerre d'un nouveau genre menée par l'Amérique avec des drones, n'a pas semblé répondre à ces critères et a été accueilli par des sifflets.

Les Français, venus en force cette année dans la Cité des Doges avec quatre longs métrages, n'étaient pas donnés comme de possibles vainqueurs même si le touchant et réaliste Loin des hommes, de David Oelhoffen, avec Viggo Mortensen, semblait devancer dans le coeur des festivaliers ses trois compatriotes: Le dernier coup de marteau, d'Alix Delaporte, 3 Coeurs, de Benoît Jacquot et La rançon de la gloire, de Xavier Beauvois.

Inspiré d'une nouvelle d'Albert Camus L'hôte, issu du recueil L'exil et le royaume, Loin des hommes se déroule dans les montagnes de l'Atlas en 1954, au début de ce qui deviendra la guerre d'Algérie.

Autre film à ne pas négliger, The Cut, dernier volet d'une trilogie signée du réalisateur allemand d'origine turque Fatih Akin, qui raconte l'histoire d'une famille persécutée en 1915 sur fond de génocide arménien avec l'excellente prestation du jeune français Tahar Rahim (Un prophète).

À moins que les Italiens, sur leurs terres, et représentés par trois longs métrages en compétition ne tirent leur épingle du jeu.

De la production transalpine, on retiendra Anime nere, de Francesco Munzi, qui nous plonge dans les sombres coulisses de la mafia calabraise, la Ndrangheta, et Il giovane favoloso, de Mario Martone, biopic consacré au poète italien Giacomo Leopardi.