Compositeur montréalais de renommée internationale, Gabriel Thibaudeau fait escale sur son sol natal pour le festival Fantasia, qui présentera en ciné-concert The Man Who Laughs de Paul Leni. Créateur d'une trame sonore contemporaine pour ce film muet, il dirigera un ensemble constitué de neuf musiciens, dont ceux du Quatuor Molinari, le 20 juillet. Rencontre avec le virtuose à son studio d'Outremont.

Issu d'une famille dont plusieurs générations ont excellé en musique, Gabriel Thibaudeau ne pouvait faire autrement que de briller à son tour. Dès ses quatre ans et demi, l'artiste s'initiait à son instrument fétiche, le piano.

Même s'il excelle dans l'improvisation et l'interprétation, c'est davantage au compositeur que l'artiste s'identifie. «Comme tout le monde joue le même répertoire, les Olympiques du piano ne m'intéressaient pas. J'avais plus envie de jouer ce que j'avais dans la tête, ou de le faire jouer par d'autres», affirme-t-il.

Très jeune, il nichait déjà dans cet art créatif. La musique de film muet est arrivée plus tard dans son cheminement. «C'est un accident! En 1988, je me suis retrouvé à remplacer quelqu'un à la Cinémathèque québécoise. Ça fait maintenant 30 ans que je le remplace», ricane-t-il.

Carrière internationale

La Cinémathèque, quelques années après son arrivée en poste, l'a mandaté pour composer la musique du classique Le fantôme de l'opéra, interprété par l'orchestre de chambre I Musici à la Place des Arts.

«Un grand succès! Tellement que ç'a été su dans les autres cinémathèques, jusqu'à Bologne, en Italie.» Ainsi, le compositeur a traversé l'Atlantique pour interpréter son oeuvre.

«J'écris ma musique, je la dirige et je la joue. Un peu comme à l'époque de Beethoven et de Mozart.»

C'était le début d'une grande carrière internationale pour Thibaudeau. En plus de travailler dans la musique de film muet, l'artiste a composé pendant de nombreuses années pour les Grands Ballets canadiens, régulièrement en tournée. L'artiste est aussi l'invité des plus prestigieux festivals de films un peu partout sur le globe.

La création de The Man Who Laughs

Le film muet de Paul Leni The Man Who Laughs, paru en 1928, est une adaptation du roman de Victor Hugo L'homme qui rit, publié en 1869. L'histoire, romancée pour le grand écran, se situe vers la fin du XVIIsiècle.

Thibaudeau se rappelle encore le moment où il a créé cette musique composée à l'origine pour la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, en 1998. L'artiste a bénéficié de près de sept mois pour écrire cette oeuvre destinée à un petit ensemble de neuf musiciens.

Le compositeur se souvient d'avoir d'abord entamé la lecture du roman de Victor Hugo. La réflexion autour du livre - «très inspirant», évoque-t-il - s'est échelonnée sur près de trois mois. Le visionnement du film a toutefois bouleversé les images qu'il s'était faites lors de la lecture préalable. L'artiste a dû revisiter ses partitions mentales.

L'échéance ayant été fixée à la mi-mai, soit quatre mois plus tard, le musicien a ainsi entrepris une séance d'écriture intensive alors qu'il entamait une tournée. «J'écrivais sur le bord de la table à l'hôtel. Je me levais à 6 h le matin pour composer», lance-t-il, pointant l'ordinateur d'époque sur lequel il a imaginé l'oeuvre musicale.

Ayant finalement pu être livrées à temps, les partitions ont un style très lyrique, «qui souffle», explique l'auteur. Toujours dans un souci de respecter les époques, les images et les sons qui se dégagent du film muet, Gabriel Thibaudeau s'est inspiré d'une trame sonore parfois baroque, parfois romantique, mais toujours actuelle. 

____________________________________________________________________________

Le ciné-concert The Man Who Laughs sera présenté le 20 juillet, à 20 h, au théâtre D.B. Clarke de l'Université Concordia.