C'était au mois de novembre 2014. Adam Nimoy y pensait depuis un moment. Il fallait s'y mettre. Le 50anniversaire de Star Trek, la série imaginée par Gene Roddenberry, approchait. Ce serait en septembre de l'année suivante. Pour souligner la chose, le fils de Leonard Nimoy avait eu l'idée de faire un documentaire sur le personnage iconique incarné par son père.

Ils s'y sont mis. Ont discuté du contenu et de la forme du film. « Et quatre mois plus tard, il est disparu », faisait le réalisateur lors de l'entrevue téléphonique qu'il a accordée à La Presse quelques heures avant de prendre l'avion pour Montréal, où il participe au Festival international de films Fantasia en présentant For the Love of Spock.

« Nous avons attendu un mois, et décidé qu'il fallait aller de l'avant quand même », poursuit Adam Nimoy. Sauf que le documentaire se pencherait non seulement sur Spock, mais aussi sur l'homme derrière le Vulcain. « En plus, autour de moi, les gens me disaient que je devrais, moi aussi, faire partie du récit. » Il a hésité. Mais a réfléchi à cette possibilité. Est arrivé à la conclusion que, oui, le fils de Leonard pouvait être de l'aventure. « Ça rendait l'histoire unique. Mais il y avait des pièges et, pour les éviter, je me suis bien entouré. »

Afin que sa présence soit mesurée. For the Love of Spock se fait ainsi histoire de Leonard Nimoy, de Spock et, un peu, de celle du garçon qui a vu son père devenir l'idole de millions de personnes. Et, ainsi, lui échapper dans une certaine mesure. Pour lui revenir plus tard.

« Bien sûr, il y a eu une période où ç'a été difficile pour moi. Papa participait à des congrès un peu partout à travers les États-Unis et même le monde, il gagnait de l'argent ainsi, mais pour moi, ça signifiait de ne pas le voir souvent. » Il y a eu des tensions, des frictions, des mésententes. Durant l'enfance. Plus tard également.

LE DÉFI D'ÊTRE SPOCK

Le documentaire en fait état. De la réconciliation aussi. Lorsque les deux hommes, avant de faire la paix entre eux, ont fait la paix avec eux-mêmes.

« Être Spock a incontestablement été une bénédiction pour mon père et pour nous, mais, en même temps, ça n'a pas été sans défi. Ce genre de célébrité avec ce genre de personnage, c'est difficile. Entre autres, pour l'acteur qui veut faire "autre chose". »

- Adam Nimoy

Leonard Nimoy y est parvenu, il a eu une importante carrière sur les planches. Mais dans l'esprit des gens, il restait Spock. Il a donc écrit I Am Not Spock. Parue en 1979, cette biographie a choqué les fans. On l'imagine. « Les gens se sont attardés au titre... et ce titre était une erreur. Il n'y a jamais eu de conflit entre mon père et son personnage, il a toujours aimé Spock. Il en était très fier. Mais les fans ont perçu cela comme une attaque à leur idole alors qu'en réalité, il voulait dire à ces gens qui l'interpellaient sur la rue avec des "Hi, Spock !" ou "Comment ça va, Spock ? !" qu'il était Leonard Nimoy, pas un Vulcain. Mais ce titre était une erreur. »

L'acteur a par la suite publié I Am Spock. Pour rectifier le tir. « Parce que cette aventure a été merveilleuse. Et elle l'a été jusqu'à la fin. Papa aimait les nouveaux films, la nouvelle distribution et J.J. Abrams. Il est aussi devenu très proche de Zachary Quinto. Leur relation en était presque une de père-fils. »

Une aventure merveilleuse, donc. Et longue. « Personne n'avait vu ça venir, au début. Je pense que les gens ont adhéré à ce point-là pour la vision positive du futur que présente Star Trek. Nous avons faim d'harmonie. Et on n'en trouve malheureusement trop peu dans le monde. » L'entrevue se déroulait au moment où, à Nice, plus de 80 personnes trouvaient la mort sous les roues du véhicule conduit par Mohamed Lahouaiej Bouhlel.

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For the Love of Spock est présenté dans le cadre de Fantasia, samedi à 16 h 10 au Théâtre Hall de l'Université Concordia.

PHOTO ARCHIVES REUTERS

Leonard Nimoy a incarné Spock pour la première fois en 1964.