Lorsque Jessy Beaulieu nous ouvre la porte de son bel appartement aux murs de briques rouges, on remarque tout de suite la décoration: une bibliothèque chargée de films VHS, des têtes de monstres en guise de bibelots, des affiches du festival Fantasia, une citrouille.

«Ici, c'est l'Halloween à l'année», lance en riant la jeune femme de 31 ans qui, après des études en techniques vétérinaires, travaille depuis trois ans dans le domaine de la finance.

Son conjoint Philippe Tremblay et elle sont de vrais fans de films de genre. Ils en parlent avec aplomb et s'y connaissent. Ils collectionnent les artefacts avec passion, mais avec aussi un sens de la mesure tributaire de leur espace et leur budget. Ils collectionnent aussi des disques vinyle, des DVD, des comic books et quelques jeux vidéo.

Leur intérêt pour le cinéma de genre s'articule autour de trois grands thèmes: la nostalgie, le goût de la marge et l'objet.

«Je ne sais pas exactement comment m'est venu ce goût pour le cinéma de genre. Mais je crois que, nécessairement, c'est un peu l'influence de l'entourage, dit Jessy. Mon père Yvon aimait beaucoup le cinéma de science-fiction. Tous les dimanches, il regardait La planète des singes à Canal D. Il était aussi un fan de Star Trek. Quant à mon frère Jocelyn, mon aîné de 15 ans, il écoutait beaucoup de films d'horreur, très à la mode à la fin des années 80, début des années 90.»

Ah! la période fin 80, début 90. Jessy en parle comme le saint Graal cinématographique. «Plusieurs personnes dans la trentaine comme nous sommes encore accrochés à ce qui était cool lorsque nous avions 10-12 ans. Nous avons vu les Terminator et les Mad Max à la télé. Le cinéma de genre nous permet de ramener ça avec une saveur un peu plus moderne.»

Nostalgie

Voilà pour la nostalgie. Quant au goût de la marge, Jessy le résume en une seule phrase percutante et implacable. «Il y aura toujours des gens attirés par ce qui est étrange, soutient-elle. Moi, j'ai le goût de voir des choses différentes, bizarres, inhabituelles.»

Ça ne veut pas dire que Philippe et elle rejettent tout ce qui s'appelle cinéma grand public. Ils adorent Love Actually et When Harry Met Sally, par exemple. Dans leur vidéothèque, ils possèdent des oeuvres comme 1987, de Ricardo Trogi, au milieu de titres tels Cocoon, Halloween, The Fly, Alien et une panoplie de Frankenstein, dont le long métrage Frankenstein and Me de Robert Tinnell avec une certaine Véronique Cloutier dans un rôle de vampire!

Reste l'objet. Comme la pochette d'un disque vinyle l'est pour la musique, le boîtier d'un film VHS possède plus d'attrait qu'une image pixellisée sur une plateforme web de diffusion.

«Le disque de vinyle, le VHS étaient importants pour leur pochette, leur couverture, dit Jessy. C'était souvent la première motivation pour choisir un film. Si je trouvais une couverture cool, elle m'appelait. Aujourd'hui, quand tu vas sur Netfilx, c'est un peu moins ça...»

Jessy convient que la qualité du VHS est «horrible» et qu'avec le temps, les films se dégradent un peu plus à chaque écoute. Mais, dit-elle, voilà un autre élément de charme s'ajoutant à l'attrait des films de genre: leur imperfection.

«Un film comme Alien est à mon avis plus épeurant en VHS, quand tu ne vois pas vraiment ce qui se passe, qu'en Blue-Ray où tu saisis tous les détails, dit-elle. C'est une des différences entre le cinéma grand public et le cinéma de genre: ce dernier est moins parfait. Le cinéma de genre a moins de budgets, est fait avec moins de matériel avant-gardiste, compte moins de vedettes. Il est fait d'erreurs, de défauts, d'imperfections. Mais c'est... différent!»