À l'occasion du Festival du nouveau cinéma, le documentaire Seth's Dominion de Luc Chamberland nous invite à rencontrer Seth, bédéiste et personnage hors du commun.

Lorsque, le matin, il descend à son atelier, au sous-sol de sa résidence de Guelph, le bédéiste Seth entre dans un autre monde. Celui de sa chère solitude et de sa création.

Croulant sous les plumes, les crayons, le papier, les albums, les pots de colle et les modèles réduits de bâtiments d'une ville imaginaire qu'il construit dans ses temps libres, son atelier est une bulle où le temps s'arrête, où la planète ne tourne plus.

Vrai que l'endroit a des allures très vintage et nous renvoie loin au XXe siècle. On peut le voir dans Seth's Dominion, singulier documentaire de Luc Chamberland consacré au travail de cet artiste.

De son vrai nom Gregory Gallant, Seth a fait sa marque avec le cycle de bandes dessinées Palookaville, ses romans graphiques autobiographiques et certains travaux commerciaux, dont des illustrations pour des unes de magazines tels que le New Yorker.

Il a aussi la réputation d'être un grand solitaire - même s'il est marié et a des amis - et on n'hésite pas à le qualifier d'ermite de Guelph, un sobriquet qui lui convient. On s'étonne donc un brin de le voir se confier à la caméra et faire la narration du documentaire de Chamberland. On s'étonne du fait qu'il nous laisse entrer dans son antre et même ouvrir son journal personnel, tenu, bien entendu, sous la forme d'une bande dessinée.

«Je ne suis pas timide et je parle aux gens. Simplement, j'aime bien la solitude, précise Seth en entrevue téléphonique. Lorsque Luc m'a sollicité pour faire ce documentaire, j'ai trouvé qu'il avait l'air d'un bon gars et j'ai accepté sa proposition. Mais une fois le tournage commencé, c'était comme une torture. J'aime parler, mais c'est différent à la caméra. Il est alors plus difficile d'exposer ses idées. Les choses se sont améliorées à mesure qu'avançait le tournage.»

Joyeux désordre

Diplômé de l'Université Concordia et spécialiste du cinéma d'animation, Luc Chamberland a fait un moyen métrage documentaire à l'image de son sujet. Y alternent dans un joyeux désordre des séquences animées, des bouts d'entrevues classiques, des montages où Seth évolue dans un cadrage vieillot rappelant les filtres Instagram, etc. Le bédéiste raconte sa vie - pas toujours rose - et a même dessiné des planches originales pour alimenter le scénario.

C'est dans le film qu'on apprend qu'il travaille très tôt dans son studio. Comme il travaille à la maison et passe beaucoup de temps seul, on lui demande d'où vient son inspiration. On le sent sourire au bout de la ligne.

«Elle vient beaucoup de ma vie intérieure, dit-il. Je m'inspire de choses que j'ai vécues ou que j'ai lues. D'autres préfèrent aller à la rencontre des gens, ce qui est bien aussi. Mais la solitude me permet davantage de créer. J'ai le sentiment qu'un gars comme moi est davantage porté à écrire des histoires à un seul personnage, ou très peu. Ceux qui vont vers les gens créent des histoires dans lesquelles les personnages sont nombreux.»

Seth n'a pas vu la version finale du documentaire de Luc Chamberland, mais ça devrait être chose faite samedi puisqu'il sera à la projection de l'après-midi au FNC.

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Samedi, 16 h 30, Université Concordia (salle H-110)

Jeudi 16 octobre, 15 h, Annexe du pavillon Judith-Jasmin