«Une fois de plus, la louve du FNC fait d'Excentris sa tanière», lisait-on en octobre 2013 sur le site du cinéma Excentris. Or, la louve est partie. Le Festival du nouveau cinéma (FNC) délaisse en effet l'édifice du cinéma indépendant du boulevard Saint-Laurent dans le sillon d'une «nouvelle configuration» des lieux.

Le FNC ne présente pas non plus d'événements à la Cinémathèque québécoise, au Cinéma Impérial et au Centre PHI du Vieux-Montréal. Les quelque 400 films et événements spéciaux de sa 43e édition seront présentés, du 8 au 19 octobre, au Théâtre Hall et à la salle J.A. DeSève de l'Université Concordia, au Quartier latin, au Cinéma du Parc, à l'ancien cinéma ONF, sous un nouveau dôme campé à la place des Festivals pour des événements gratuits, à l'Agora du Coeur des sciences de l'UQAM, au Théâtre Maisonneuve et à l'hôtel Hyatt.

En entrevue, le directeur général du FNC, Nicolas Girard Deltruc, reconnaît que des raisons financières sont au coeur de cette décision. «Il y a des décisions d'ordre budgétaire qui doivent être prises pour privilégier le contenu, dit-il. Il faut reprendre l'ensemble des budgets, voir où sont les dépenses et comment on peut réinvestir, parce qu'on traverse une période assez compliquée au niveau du financement public.»

Il croit que cette reconfiguration des lieux de présentation aidera à trouver des partenaires privés et drainera une nouvelle clientèle, comme les étudiants de l'Université Concordia.

Décision inattendue

Chez Excentris, on se dit surpris par la décision du FNC, communiquée «sur le tard», dit la directrice générale Hélène Blanchet. «Chaque année, nous faisons un post mortem de l'événement. En novembre 2013, nous nous étions entendus verbalement sur le fait que le FNC reviendrait en 2014 comme il le fait depuis de très nombreuses années. Mais en juillet, n'ayant pas de nouvelles, j'ai envoyé un courriel à M. Deltruc, qui m'a répondu en quelques mots que le festival allait ailleurs pour des raisons financières.»

Mme Blanchet n'a pas insisté. «Nous vivons tous des difficultés financières, et je pense qu'il faut le voir dans ce sens-là», dit-elle, ajoutant que la perte du FNC ne signifie pas nécessairement une perte financière. «Ce n'est pas un manque à gagner. Lorsqu'on programme un festival, on perd des films quelques semaines à l'avance, dit-elle. Présenter un festival est davantage un choix culturel qu'économique.»

La programmation en cinq temps

Compétition internationale

Quinze films, dont deux québécois, Félix et Meira, de Maxime Giroux, et L'amour au temps de la guerre civile, de Rodrigue Jean, sont inscrits dans la course à la Louve d'Or, prix remis au meilleur film du FNC. Cette sélection comprend sept premiers longs métrages, dont Difret, de Zeresenay Behrane Mehan, une première oeuvre produite et réalisée en Éthiopie. «Nous l'avons sélectionné pour sa valeur. On ne fait aucun compromis. Si le film est en compétition officielle, c'est en raison de sa valeur en terme de contenu», dit le directeur général du FNC, Nicolas Girard Deltruc.

Présentation spéciale

La section consacrée aux réalisateurs réputés et aux oeuvres qui ont fait parler d'elles au cours des derniers mois. On y verra entre autres Wild, film de Jean-Marc Vallée avec Reese Witherspoon, lancé il y a quelques semaines à Telluride. Autre film signé par un Québécois, Boychoir de François Girard avec Dustin Hoffman. De Cannes nous arrive Adieu au langage de Jean-Luc Godard, lauréat ex aequo du Prix du jury avec Mommy de Xavier Dolan. Le vétéran Amos Gitai nous revient quant à lui avec Ana Arabia. C'est aussi dans cette section que sera présenté Love Projet de Carole Laure en première mondiale.

Panorama

Costaude, cette section du FNC consacrée au cinéma indépendant rassemble 39 oeuvres dont 4 premières mondiales et 11 premiers films. On y retient entre autres le documentaire déjanté Bjork - Biophilia Live de Nick Fenton et Peter Strickland. De Cannes, nous arrivent les oeuvres L'institutrice, de Navad Lapid, et Refugiado, de Diego Lerman. Gaël Garcia Bernal est par ailleurs en vedette dans El Ardor de Pablo Fendrik sur l'histoire d'un justicier sorti tout droit de la forêt tropicale argentine. Parmi une cinquantaine d'oeuvres iraniennes qu'on verra cette année au FNC, il y a Mes souliers rouges de Sara Rastegar.

Focus

Comme de coutume, le cinéma québécois et canadien a sa section. Cette année, elle regroupe 16 oeuvres, dont la moitié sont inscrites en compétition. Parmi les titres attendus, soulignons le documentaire Le prix à payer de Harold Crooks, qui avait coréalisé Survivre au progrès avec Mathieu Roy, ou encore Je suis à toi, coproduction Belgique/Québec mettant en vedette Monia Chokri. Après La cicatrice, oeuvre très appréciée il y a deux ans au FNC, Jimmy Larouche est de retour avec Antoine et Marie, un film qui parle de la drogue du viol. De son côté, Noël Mitrani fait de nouveau appel à son comédien fétiche Laurent Lucas dans Le militaire.

Hommages et rétrospectives

Les nostalgiques et amateurs d'hommages seront choyés avec de nombreuses présentations gratuites. À commencer par ce coup de chapeau au projet Éléphant avec la présentation de cinq classiques restaurés, soit: dParlez-nous d'amour de Jean-Claude Lord, Tit-Coq de Gratien Gélinas, The Big Red One: The Reconstruction de Samuel Fuller, Le jour se lèved de Samuel Carné et Liste noire de Jean-Marc Vallée. Du côté des hommages, notons ceux rendus à Robin Williams (avec la projection de Jumanji), au documentariste canadien Peter Wintonick, à Frédéric Back et à Lauren Bacall, etc.