Quand il a lu This is Where I Leave You de Jonathan Tropper, le réalisateur d'origine montréalaise Shawn Levy n'avait qu'un désir: porter ce roman à l'écran. Cinq ans après la publication du livre, c'est fait. La première mondiale a lieu demain au TIFF.

«J'avais lu le bouquin dès sa sortie et quand j'ai appris que Warner en avait acquis les droits, je les ai approchés en criant «Je veux le faire! Moi, moi, moi, moi!» », rigolait le réalisateur en entrevue téléphonique. D'autres que lui ont été pressentis pendant qu'il travaillait sur Date Night et Real Steel. Puis, quand le projet a été mis de côté, il a rappelé sa présence au studio. «Remember me?!»

Et il s'est finalement fait confier This is Where I Leave You. Parce qu'il n'avait pas l'intention de lâcher ce morceau-là. «D'abord, j'avais adoré le roman. Ensuite, je désirais faire un film différent: avec Date Night et Night at the Museum, on me connaissait pour de grosses comédies. J'avais l'occasion, ici, de réaliser quelque chose de plus intime et dont le ton ne serait pas purement comique, mais toucherait aussi au drame. Enfin, pour moi, ce film est une lettre d'amour aux familles, il traduit ce que je pense des familles. Bref, le sujet m'importe», assure-t-il.

Et de mentionner ses cinq frères et soeurs («Plusieurs détails du scénario sont directement tirés de ma vie et de mes relations avec eux»), ses quatre enfants et sa femme, Serena, entrée dans sa vie il y a 20 ans.

«Je ne veux pas faire de digression, mais disons que grâce à elle, je sais que le vrai amour peut vous sauver. Or cette idée-là, dans le film, est explorée dans la relation entre Jason (Bateman) et Rose (Byrne).»

This is Where I Leave You raconte comment Judd, fraîchement divorcé et incarné par Jason Bateman, va renouer, dans des circonstances pas banales, avec Penny (Rose Byrne), qui était follement amoureuse de lui quand ils étaient... lui, jeune, et elle, très jeune.

Deux défis

Ils s'étaient perdus de vue, mais le retour de Judd dans la maison familiale va les remettre en présence. En effet, son père vient de mourir et sa mère annonce qu'à la demande du défunt, ses enfants et elle feront shiv'a.

Donc, comme le veut la tradition judaïque, ils observeront une période de deuil d'une semaine, sous le même toit. On ajoute les conjoints et les tout-petits, il y aura du monde dans ce lieu clos. Et des tensions entre la mère (Jane Fonda), les frères (Jason Bateman, Adam Driver et Corey Stoll) et la soeur (Tina Fey).

Dans ce résumé se trouvent les deux défis que Shawn Levy a eu à relever ici.

D'abord, la distribution. Imposante. Composée de comédiens de renom - «dont je suis fan et que je savais aussi à l'aise dans la comédie que dans le drame» -, précise le réalisateur qui aime ces familles dysfonctionnelles présentées à l'écran dans Terms of Endearment, Jerry Maguire et autres Little Miss Sunshine.

«Mais faire un horaire avec ces acteurs, nombreux et occupés, a été très, très, très complexe. J'ai passé des jours et des jours là-dessus en préproduction afin d'être sûr que tous seraient là pour chaque scène où j'aurais besoin d'eux.»

Ensuite, la fameuse maison. «J'aime parfois que mes films aient l'air plus grands que nature, mais je tenais à ce que celui-ci donne une impression d'authenticité. Nous avons donc tourné dans une maison de Long Island. Une grosse maison, mais quand même pas un château. Bref, ça n'a vraiment pas été commode de tourner là-dedans avec autant d'acteurs. Mais l'effet de réalisme que ça apporte est, au bout du compte, payant.»

D'autant que les membres de la distribution, entre les prises, se retrouvaient dans les pièces du haut, nouant ces liens quasi familiaux que Shawn Levy recherche sur tous ses plateaux. Homme de famille à la maison comme au boulot, quoi.

Les adieux à Robin Williams

Un peu comme Christopher Nolan qui montait The Dark Knight dans le sillage de la mort de Heath Ledger, Shawn Levy passe ces jours-ci «en compagnie» de Robin Williams: le réalisateur est en effet en plein montage de Night in the Museum: Secret of the Tomb, dans lequel l'acteur mort le 11 août reprend, pour la troisième fois, le rôle de Theodore Roosevelt.

«C'est difficile et extrêmement triste, admet Shawn Levy, surtout que dans ce film-ci, Robin est beaucoup plus présent que dans les deux précédents. Comme il avait plus de jours de tournage, nous sommes devenus très proches. En ce moment, je passe donc mes journées à regarder sa performance, à apprécier son talent. Et il n'y a pas d'échappatoire.»

Bref, une période que le réalisateur dit traverser «avec des hauts et des bas»: «C'est le dernier film qu'il a tourné. Mais sa performance est tellement bonne, drôle et poignante qu'au moins, je me dis que ce sera un hommage très affectueux à son immense talent», conclut celui qui se sent toujours très protecteur de ses acteurs - «Mon travail est de présenter leurs meilleurs moments» -, mais qui, dans les circonstances, sent «qu'une couche de responsabilité a été ajoutée». «Et c'est une responsabilité que je prends très au sérieux», dit-il.

This is Where I Leave You (C'est ici que l'on se quitte) prend l'affiche le 19 septembre.