Notre envoyé spécial sur la Croisette fait le compte rendu des dernières nouvelles du Festival de Cannes.

Yomeddine (en compétition): Un road movie pas comme les autres

Ce premier long métrage du cinéaste austro-égyptien A.B. Shawky fut le seul film de la compétition officielle présenté hier en séance de presse. Il s'agit d'un road movie particulièrement touchant, dans lequel un lépreux, interprété par un non-professionnel ayant véritablement été atteint par la maladie, entreprend un voyage à dos d'âne pour retrouver une famille qu'il n'a pas vue depuis 30 ans. Yomeddine, dont le récit évoque le poids du regard des autres, aurait pu sombrer dans la sentimentalité racoleuse, d'autant plus qu'un orphelin dégourdi, âgé d'une dizaine d'années, tient à accompagner le protagoniste. Or, A.B. Shawky a mis à profit son passé de documentariste et a su faire preuve de retenue. Cela dit, son film vient bien près de tomber dans la démonstration appuyée. Mais le ton sincère et l'aspect attachant de cette histoire font de Yomeddine un beau feelgood movie. Succès à prévoir sur tout le circuit festivalier au cours de la prochaine année.

Wildlife (à la Semaine de la critique): Paul Dano convaincant à titre de réalisateur

Dans There Will Be Blood (Paul Thomas Anderson) et Prisoners (Denis Villeneuve), Paul Dano s'est fait remarquer en proposant des compositions très particulières. On retrouve cette singularité dans sa toute première réalisation, très maîtrisée. Mettant en vedette Jake Gyllenhaal et Carey Mulligan, Wildlife, qui a ouvert hier la Semaine de la critique (une section parallèle dévolue aux premiers et seconds films), est un drame familial campé en 1960, dans lequel un couple se désagrège sous les yeux de son fils de 14 ans (Ed Oxenbould). Adapté du roman de Richard Ford (Une saison ardente en français), le récit s'illustre surtout par la façon à la fois sobre et éloquente qu'a choisie Paul Dano pour raconter l'histoire, mais aussi par la justesse avec laquelle il évoque un changement de mentalités. Carey Mulligan est magnifique dans le rôle d'une «femme d'intérieur» dont la colère gronde en sourdine. Jake Gyllenhaal l'est tout autant dans celui d'un homme bien conscient que la nouvelle époque annoncée lui sera fatale s'il ne réussit pas à s'adapter.

photo Joel C Ryan, associated press

Paul Dano, réalisateur du film Wildlife