Histoire d'amour entre deux employés d'une centrale nucléaire, campés par Tahar Rahim et Léa Seydoux: avec Grand Central, la Française Rebecca Zlotowski signe un film sous tension, présenté samedi à Cannes dans la section Un certain regard.

Chaleureusement accueilli, Grand Central est le deuxième film de cette réalisatrice de 33 ans, après «Belle Epine», portrait d'une jeune fille en crise présenté à l'édition 2010 de la Semaine de la critique à Cannes. Rebecca Zlotowski y retrouve la jeune actrice Léa Seydoux, dont le film La vie d'Adèle (Abdellatif Kechiche) est présenté en compétition officielle.

Gary Manda (Tahar Rahim), jeune homme sans diplôme à la recherche d'un boulot, se retrouve embauché dans une centrale nucléaire. Là, il s'éprend de Karole, la compagne de son collègue Toni, et va être envahi par l'amour comme par les radiations.

Le film, tourné dans une centrale autrichienne jamais utilisée, trouve dans ce milieu du nucléaire «un territoire de fiction absolu», où «pouvaient s'épanouir des passions inouïes comme partout où l'on frôle le danger et la mort quotidiennement», explique Rebecca Zlotowski.

Ce monde «s'est imposé pour son mystère autant que par la grande analogie amoureuse qu'il portait: comme le sentiment amoureux, une centrale est un lieu dangereux qui distille une contamination lente mais certaine, incolore et inodore», poursuit la réalisatrice, qui a voulu «y ancrer des sentiments forts, nobles».

Figure sensuelle

Claude Dubout, un ouvrier qui avait écrit un récit autobiographique, Je suis décontamineur dans le nucléaire, a été le conseiller technique du film, dont un certain nombre de scènes se passent dans la centrale, au plus près du travail de ces hommes.

Ces sans-grades, employés par des entreprises prestataires pour s'occuper des déchets radioactifs, habitant des mobile-homes près des centrales, défient un danger souvent invisible.

Dans cet univers, Rebecca Zlotowski installe une tension soulignée par la musique souvent métallique et circulaire de Rob.

Aux côtés de Tahar Rahim --présent à Cannes aussi pour le film Le passé de l'Iranien Asghar Farhadi, en compétition--, Denis Ménochet et Olivier Gourmet incarnent entre autres ces hommes résignés.

Ils vivent dans la peur de la «dose» de radioactivité à contrôler. «C'est une lutte continue. On ne s'en débarrasse jamais», explique Gilles, le personnage incarné par Olivier Gourmet.

Comme le désir amoureux, la dose c'est «la peur, l'inquiétude», les jambes «qui tremblent», la «vue brouillée», indique de son côté Karole/Léa Seydoux.

Au milieu de ce groupe masculin, elle incarne une figure érotique et sensuelle, écartelée entre deux hommes, dépassée par la relation qu'elle entame.

«Plus elle était ouvertement sexuelle et sexuée, plus le sentiment amoureux qui allait la submerger après était troublant pour moi», souligne Rebecca Zlotowski.