Invitée du festival Cinemania, Julie Gayet y présente ses plus récents projets, dont Taularde, film d'Audrey Estrougo qu'elle a produit. En entrevue à La Presse, elle convient que son travail de productrice prend de plus en plus le dessus sur celui d'actrice.

Il y a cinq ans, la comédienne Julie Gayet venait à Montréal présenter le film 8 fois debout de Xabi Molia au Festival du nouveau cinéma. L'oeuvre, dans laquelle elle partageait la vedette avec Denis Podalydès, était la première de sa société de production Rouge International.

Aujourd'hui, Rouge International est engagée dans de nombreux projets et le travail de productrice occupe la plus grande partie de la vie professionnelle de la comédienne. Au point où cette dernière va jusqu'à reconnaître qu'il y a «malheureusement» de moins en moins de place dans son agenda pour être devant la caméra.

«Prendre de plus petits rôles, c'est le vrai plaisir. J'aime jouer, c'est ma formation, c'est là d'où je viens. Mais être productrice prend beaucoup de temps. Alors, défendre un premier rôle où je devrais porter le film du début jusqu'à la fin, je dois avouer que ça va être de plus en plus compliqué pour moi», dit celle qui partage la vie du président français François Hollande.

Elle ne s'épanche pas toutefois bien longtemps sur le fait que le jeu n'est plus sur le dessus de sa pile des priorités. Allumée, enthousiaste, habitée, Julie Gayet l'est par ce travail de productrice qui «fait sens» dans son cheminement. Il y a chez elle une volonté de servir d'intermédiaire, de transmettre la pensée des réalisateurs pour qui elle a une grande estime.

«Lorsque j'ai commencé comme comédienne, ce que j'ai aimé plus que tout, ce sont les metteurs en scène, les réalisateurs, dit-elle. Agnès Varda, avec qui j'ai tourné Les cent et une nuits de Simon Cinéma, m'a fait plonger dans cette réalité. En fait, un film, c'est un metteur en scène, c'est un point de vue, un regard.»

Son rôle de productrice est de défendre ce point de vue, poursuit-elle.

«Mon travail est de voir à ce que les choses soient cohérentes; travailler le scénario, travailler sur le montage, traduire l'univers du réalisateur auprès des financiers, ça sert à ça, un producteur. J'aimais faire ça lorsque j'étais comédienne, alors c'est assez facile de le faire comme productrice. Être dans la tête du réalisateur, comprendre exactement le film qu'il veut faire et le traduire. Et réfléchir à quel endroit ça peut aller, comment on peut le sortir, avec quel distributeur, etc.»

Taularde

À Cinemania, Julie Gayet accompagne entre autres le film Taularde qu'elle produit. Mettant en vedette Sophie Marceau, Anne Le Ny et la Québécoise Suzanne Clément, ce film (qui sortira le 10 février 2016 au Québec) raconte l'histoire de Mathilde (Sophie Marceau), une femme qui, voulant éviter à son amoureux de purger une longue peine de prison, se déclare coupable d'un crime qu'elle n'a pas commis.

Foi de productrice, on y retrouve une Sophie Marceau transformée. «Taularde n'est pas un film sur la prison, mais sur la plongée d'une femme qui pense qu'elle va s'en sortir et qui, petit à petit, se fait prendre dans quelque chose de plus fort qu'elle et qui va finir par l'étouffer, explique Julie Gayet. C'est très fort. Le pari est réussi et on voit Sophie comme on ne l'a jamais vue.»

Cette semaine, après un passage à San Sebastián, la maison Rouge International lancera aussi au Chili La voz en off, film de Christián Jiménez portant sur Sofia, une trentenaire aspirée dans mille et une aventures familiales le jour où elle fait voeu de tranquillité en renonçant au cellulaire, à la télé et même à la lecture.

Le producteur montréalais Nicolas Comeau est associé à ce film dans lequel joue Niels Schneider. «Il a été incroyable, dit Julie Gayet à propos du comédien. Je l'ai appelé en lui demandant s'il pouvait jouer dans ce film où il y avait un rôle de francophone. Il a rigolé et m'a dit avoir peu de temps à sa disposition. Lorsque je lui ai dit que ce n'était que 15 jours, il est parti au Chili comme ça (elle se tape dans les mains). Il est extrêmement bien dans le film.»

Enfin, Julie Gayet a présenté, plus tôt cette semaine, deux documentaires sur des cinéastes, hommes et femmes, qu'elle a coréalisés. Mais elle rejette l'épithète de réalisatrice. «Moi, j'ai fait ces petits documentaires sur des réalisateurs et réalisatrices que j'admire, que je trouve intelligents, brillants et qui ont un regard sur le monde à part.»

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Taularde, ce soir, à 20h15, et demain, à 16h, au Cinéma Impérial

Cinq films avec Julie Gayet

Les cent et une nuits de Simon Cinéma

Dans ce film d'Agnès Varda sorti en 1995, la jeune Julie Gayet incarne Camille qui donne la réplique à Monsieur Cinéma (Michel Piccoli), un quasi-centenaire croyant incarner l'histoire du cinéma à lui seul. «Agnès Varda, c'est un peu mon modèle», dit-elle en entrevue.

Select Hotel

Comédie dramatique se déroulant dans un hôtel miteux, signée Laurent Bouhnik, ce long métrage sorti en 1997 a valu trois prix à Julie Gayet, dont le prix Romy-Schneider remis par un jury de journalistes à une comédienne au talent prometteur.

La turbulence des fluides

Dans ce film de la Québécoise Manon Briand tourné sur la Côte-Nord et sorti en 2002, Julie Gayet interprétait Catherine, une scientifique et amie d'enfance d'Alice (Pascale Bussières), sismologue dépêchée à Baie-Comeau pour résoudre un phénomène inexpliqué. Au Québec, Julie Gayet a aussi donné la réplique à Roy Dupuis dans L'autre maison de Mathieu Roy.

8 fois debout

Premier film de la société Rouge International qu'elle a fondée, 8 fois debout est un beau drame poétique de Xabi Molia dans lequel deux êtres dans la marge tentent de trouver un chemin vers la lumière. Ce film reflétant l'engagement social de Julie Gayet lui a valu le prix de la meilleure actrice au Festival du film de Tokyo en 2009.

Quai d'Orsay

Pour son rôle de Valérie Dumontheil, conseillère politique à la direction Afrique et femme fatale du ministère français des Affaires étrangères, Julie Gayet s'est retrouvée en nomination dans la catégorie du meilleur second rôle féminin aux Césars 2014. Ironiquement, le gala a eu lieu un mois après les révélations du magazine Closer sur sa vie privée.