Hier, Anaïs Barbeau-Lavalette a été plongée en plein tourbillon médiatique. Son deuxième long métrage, Inch'Allah, présenté en primeur mondiale au TIFF, suscite la curiosité. À la projection réservée aux journalistes et aux membres de l'industrie, on ne comptait pratiquement aucun siège vide. Ici, tout le monde sait qu'Inch'Allah est produit par la société (micro_scope) qui compte notamment Incendies et Monsieur Lazhar dans son catalogue.

«Je n'avais pas mesuré à quel point ce serait vertigineux!» lance spontanément l'auteure cinéaste quand on lui demande sa première impression. C'est gros. Lors de la première, j'ai eu le sentiment que j'étais en train de fermer un chapitre, non seulement par rapport au film, mais aussi après des années de liens étroits avec un pays. À force de le travailler, j'avais oublié à quel point ce film était chargé sur le plan émotif. Ça me fait du bien que des gens le voient enfin, de ne plus être toute seule avec lui.»

Anaïs Barbeau-Lavalette, qui s'est fait remarquer avec son premier long métrage Le ring, s'est beaucoup projetée dans le personnage campé par Évelyne Brochu. Inch'Allah relate le parcours de Chloé, une obstétricienne québécoise qui accompagne les femmes enceintes dans une clinique de fortune d'un camp de réfugiés palestiniens, en Cisjordanie.

«J'ai fait mes premiers pas en territoire palestinien, il y a quelques années, pour y tourner un documentaire, explique la réalisatrice. J'ai vu un enfant se faire tuer sous mes yeux. J'ai travaillé dans un camp de réfugiés; fait des ateliers de théâtre avec des enfants. Il y avait près de là une jeune femme qui, tragiquement, s'est avérée être la première femme palestinienne à se transformer en bombe humaine. Ces choses-là te marquent. Tu te demandes quoi faire avec ces émotions-là.»

Pour évoquer le bouleversement intérieur de son héroïne, Anaïs Barbeau-Lavalette a choisi d'emprunter une approche plus impressionniste que spectaculaire.

«Je n'avais pas envie de faire une exposition du conflit israélo-palestinien, dit-elle. Je souhaitais plutôt provoquer une rencontre intime entre le spectateur et cette guerre, d'où l'approche plus intérieure. Comme Chloé, on ne comprend pas tout ce qui se passe, mais on ressent les choses de façon sensorielle.

«Je sais, poursuit-elle, que ma proposition est déstabilisante. Le cinéma sert à cela aussi parfois. On souhaite évidemment montrer son film au plus grand nombre de spectateurs possible. Mais, à la rigueur, ce n'est pas important si les gens l'aiment ou ne l'aiment pas. S'il leur reste quand même quelque chose à la sortie, ou s'il y a des choses qui les interpellent d'une façon ou d'une autre, c'est déjà beaucoup.»

Il est encore difficile de mesurer l'accueil qu'obtient le film au TIFF. Sur le plan médiatique, les échos se font discrets. Quelques territoires auraient été ajoutés, au cours des dernières heures, à la dizaine que comptait déjà le film sur sa liste de distributeurs internationaux. Anaïs Barbeau-Lavalette a aujourd'hui hâte d'entendre les gens parler de son long métrage.

Inch'Allah prend l'affiche au Québec le 28 septembre.

Un drame puissant

Un fils sort de prison. Sans boulot, sans le sou, l'homme de 48 ans n'a d'autre choix que d'aller vivre un temps chez sa vieille mère, dont il ne supporte pas les habitudes, les petites manies, la sécheresse apparente. Mère et fils ne s'entendent pas. Et leurs conflits sont parfois d'une cruauté psychologique effrayante. La vieille dame se sait atteinte d'une maladie dont l'issue dramatique ne fait aucun doute. Elle décide d'aller finir ses jours dans une maison en Suisse, là où le suicide assisté est permis.

De cette histoire toute simple, Stéphane Brizé (Je ne suis pas là pour être aimé, Mademoiselle Chambon) tire Quelques heures de printemps, un drame puissant, dénué de toute trace de sentimentalisme. Hélène Vincent (La vie est un long fleuve tranquille) propose une composition extraordinaire. Face à elle, Vincent Lindon est à la hauteur. On en frissonne encore.