Plusieurs temps forts marquent ce nouveau long métrage de Martin Provost (SéraphineViolette). Il y a d'abord l'entrée en matière, alors que nous faisons connaissance avec Claire, le personnage qu'interprète Catherine Frot. Exerçant le métier de sage-femme dans une maternité qui, progrès oblige, devra bientôt fermer ses portes, cette femme pratique ses accouchements avec rigueur, professionnalisme et attention, grâce à une maîtrise acquise au fil d'une trentaine d'années d'expérience.

Il y a ensuite cette rencontre au restaurant à la faveur d'un rendez-vous sollicité par Béatrice (Catherine Deneuve), l'ancienne maîtresse du père de Claire. Flambeuse de nature, cette femme avait quitté la famille il y a longtemps sans laisser d'adresse, laissant derrière elle un drame dont elle ne soupçonne rien. Maintenant atteinte d'une grave maladie, cette femme seule tente de rebâtir des ponts auprès de celle qu'elle avait considérée comme sa propre fille. 

En se glissant dans la peau de cette femme-enfant qui, à l'orée de la vieillesse, tente de se racheter, Catherine Deneuve affiche une vulnérabilité rarement montrée de cette façon à l'écran.

Il y a aussi cette scène au cours de laquelle une femme en train d'accoucher révèle à Claire qu'elle a été mise au monde grâce à elle il y a 28 ans. Une émotion tangible, discrète, monte alors dans le coeur de cette femme trop disciplinée, qui a toujours exercé son métier avec dévotion, sans jamais rien attendre en retour.

DE BEAUX CONTRASTES

Martin Provost, qui a toujours écrit des personnages féminins très forts, mise d'abord sur les contrastes entre les deux personnalités pour faire évoluer le récit. Autant Claire est sérieuse, responsable et un peu rigide, autant Béatrice n'a jamais suivi de règles. Elle a joué tant de sa vie que de ses amours avec, toujours, un brin de délinquance. Une rencontre avec une ancienne partenaire de jeu nous vaut d'ailleurs un très beau moment. On aurait souhaité que ce personnage, campé par Mylène Demongeot, soit mieux développé, tant on devine la richesse du passé à travers elle. En revanche, Olivier Gourmet fait merveille dans un personnage lumineux, très éloigné des rôles qu'on lui confie habituellement.

Obligée de faire face à une partie de sa vie qu'elle croyait pourtant avoir déjà réglée, Claire s'ouvrira peu à peu à ses propres sentiments au contact de Béatrice, une femme envers qui elle a pourtant nourri beaucoup de colère. Car au-delà du milieu dans lequel Claire travaille, qui est très justement décrit, au-delà, aussi, de la maladie d'une femme qui sait maintenant son temps compté, Martin Provost aborde le thème de l'amour filial, gratuit, sans condition, que Claire, d'une certaine façon, a transposé dans sa profession.

UNE ÉMOTION TANGIBLE

Sage femme bénéficie aussi, bien sûr, des présences impériales des deux Catherine. Elles trouvent ici, l'une comme l'autre, des rôles taillés sur mesure, magnifiquement complémentaires. Si le récit se révèle parfois un peu prévisible, Provost parvient toujours à surprendre au détour d'une scène. Il émane de ce film une émotion tangible, qui ravira les admirateurs de ces deux grandes actrices.

Sage femme. Drame de Martin Provost. Avec Catherine Deneuve, Catherine Frot, Olivier Gourmet. 1 h 57.

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Image fournie par MK2 | Mile End

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