À l'été 2010, Lebanon, précédent long métrage de Samuel Maoz, nous avait ébloui. L'approche narrative du cinéaste israélien nous avait renversé. Presque huit ans plus tard, le constat reste inchangé. Maoz filme à bout portant.

Et ça fait mal!

Au point que la ministre de la Culture d'Israël, Miri Regev, a exprimé sa honte de voir le réalisateur salir l'image de l'armée israélienne. Notamment dans une scène hypnotique où une poignée de soldats à peine sortis de l'adolescence tuent par erreur quatre Palestiniens et où leurs supérieurs effacent toutes les traces de cette bavure.

Maoz a plaidé l'allégorie, la métaphore, assurant qu'il fallait voir dans cette scène une allusion à l'éternelle confrontation avec la Palestine, bourbier dont il impute la faute à son pays.

Force est de constater que dans ce long métrage d'une incroyable puissance d'évocation, l'emploi de la formule métaphorique est, effectivement, généreux.

À commencer par le titre du film qui fait allusion tant au nom du poste-frontière où Jonathan (Yonatan Shiray) et ses frères d'armes s'ennuient à mourir qu'à la danse, un carré qui ramène au point de départ, autre clin d'oeil au conflit.

Jonathan, donc. Au début du film, deux représentants de l'armée israélienne viennent cogner à la porte de ses parents, Michael Feldman (excellent Lior Ashkenazi) et sa femme Dafna (Sarah Adler), pour leur annoncer la mort de leur fils. Avec eux, le cinéphile sombre dans le désespoir. Jusqu'à ce que de nouveaux officiers viennent s'excuser. Il y a eu méprise.

Dans la seconde partie de l'oeuvre, histoire en parallèle, Jonathan et ses compagnons tuent le temps dans le désert, levant une simple barrière pour faire passer soit un chameau, soit des visiteurs palestiniens.

La partie finale, alors que Jonathan est ramené vers sa famille, propose un dénouement surprenant, quasi invraisemblable, et pourtant plausible, où tous les éléments de l'histoire s'imbriquent les uns dans les autres.

Au-delà des métaphores, Samuel Maoz polit chacun de ses plans pour nous raconter cette histoire avec un minimum de mots. La forme narrative est puissante, renversante, convaincante. Par exemple, toute la première partie est campée dans une atmosphère froide, dans un décor (Michael Feldman est architecte) aux lignes épurées, aux volumes parfaits, aux couleurs effacées. Or, la chambre de Jonathan, lumineuse et en désordre, fait contraste. La direction photo, signée Giora Bejach, est encore plus spectaculaire dans les scènes du désert.

Un peu dommage que la toute dernière scène soit molle dans sa composition.

Présenté en première mondiale à la Mostra de Venise l'an dernier, Foxtrot en est reparti avec le Lion d'argent (Grand Prix du jury).

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Foxtrot. Drame de Samuel Maoz. Avec Lior Ashkenazi, Sarah Adler et Yonatan Shiray. 1 h 48.

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image Fournie par Sony Pictures Classics

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