L'approche qu'a empruntée Sophie Lorain pour porter à l'écran le scénario de Catherine Léger mérite d'être applaudie. Les choix artistiques de la réalisatrice, qui, neuf ans après Les grandes chaleurs, signe ici un deuxième long métrage, sont en effet audacieux. Et tirent le script du film vers le haut. Ce faisant, Charlotte a du fun n'a rien du «film d'ado» comme les autres.

Tout d'abord, le récit est construit autour de la sexualité d'adolescents âgés de 16 et 17 ans, surtout, fait plutôt rare, celle des jeunes filles. De surcroît, les adultes sont complètement exclus du portrait, ce qui évite d'emblée une vision où le récit serait «recentré» moralement par une volonté de conformisme. Autrement dit, les ados de Charlotte a du fun n'agissent pas tout à fait selon la vision qu'aimeraient sans doute avoir d'eux leurs aînés.

En peine d'amour, Charlotte (Marguerite Bouchard) trouve réconfort auprès de ses deux meilleures amies, Mégane (Romane Denis) et Aube (Rose Adam). À l'aube de la saison des Fêtes, le trio infernal se fera embaucher dans un magasin de grande surface, spécialisé dans la vente de jouets, simplement parce que de beaux gars de leur âge y travaillent.

À la faveur des occasions qui se présentent à elle, Charlotte décide ainsi de forcer le destin un peu et de neutraliser sa tendance à la dépendance affective en multipliant les expériences. Chacune d'entre elles aura évidemment un impact dans la dynamique du groupe. Les clips vintage de Maria Callas - qui chante L'amour est un oiseau rebelle, le plus célèbre air de l'opéra Carmen - font écho à cette façon d'assumer pleinement sa sexualité.

Sans filtre

Charlotte étant le résultat de tout le conditionnement social qui a façonné la psyché féminine depuis la nuit des temps, le sentiment de culpabilité aura cependant tôt fait de la rattraper. La jeune femme trouvera une solution somme toute radicale pour y faire face.

Si le récit semble parfois tourner en rond, on saluera quand même le choix de la réalisatrice d'avoir campé son intrigue dans un lieu quasi unique, ce qui justifie pleinement l'absence des adultes autour. Les personnages sont livrés tels qu'ils sont, sans filtre. Les dialogues font écho à leurs préoccupations, leurs désirs, leur façon d'entrer en relation, bref, les ados évoluent ici dans un environnement où ils peuvent s'exprimer en toute franchise, sans crainte d'un jugement moral.

Ainsi, Charlotte a du fun est un film d'où est extirpée toute envolée dramatique. Ce film est dénué aussi de toute prétention sociale et n'a que faire de l'avis des spécialistes en tous genres.

Quant à l'utilisation du noir et blanc, habituellement réservée aux drames d'auteurs très pointus, ce choix se justifie par la volonté de la cinéaste d'attirer l'attention sur les personnages plutôt que le décor. Bien joué.

Charlotte a du fun. Comédie dramatique de Sophie Lorain. Avec Marguerite Bouchard, Romane Denis, Rose Adam. 1h30.

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Image fournie par les Films Séville

Charlotte a du fun